#Stratégie d'investissement — 17.05.2019

La dette périphérique offre des opportunités sélectives

Eduoard Desbonnet

Nous sommes neutres sur cette classe d’actifs. La BCE reste en soutien et le portage est une bonne source de rémunération pour les investisseurs.

BNP Paribas | Peripheral Debt

Les acteurs de marché ont pris l’habitude de catégoriser les dettes des pays de la zone euro. Ainsi, l’Allemagne et les Pays-Bas sont considérés comme « cœur » et leur dette est assimilée à un actif refuge. La France, la Belgique, l’Autriche, l’Irlande et la Finlande sont « semi cœur » vu la stabilité de leurs spreads. L’Espagne, le Portugal, l’Italie et la Grèce sont dits « périphériques » du fait de leurs rendements obligataires plus élevés et de leurs spreads plus volatils.

Le spread à 10 ans, référence de marché, désigne la différence entre le rendement d’une obligation à 10 ans d’un pays et le rendement de l’obligation de référence allemande. C’est un indicateur de risque. Plus le spread est important, plus le risque est élevé.

Les spreads des pays périphériques se sont considérablement écrasés depuis 2012 suite au fameux discours de Draghi « whatever it takes » où il s’engageait à défendre la zone euro par tous les moyens à sa disposition. La Grèce, particulièrement a vu son spread fondre de 3500 points de base (35%) entre 2012 et aujourd’hui, mais aussi le Portugal (-1400pb), l’Irlande (-1100pb), l’Espagne (-500pb) et l’Italie (-270pb).

Aujourd’hui, grâce à la politique monétaire accommodante de la BCE mais aussi aux réformes structurelles engagées par les pays, la Grèce affiche un spread à 340pb (soit 3,40% au-dessus du rendement de l’obligation allemande à 10 ans), le spread italien est à 275pb, et les spreads portugais et espagnols sont au plus bas, à respectivement 115pb et 96pb.

La dette périphérique a été particulièrement plébiscitée dernièrement par les investisseurs. La demande a été forte pour les nouvelles émissions et la Grèce a fait un retour gagnant sur les marchés. Les investisseurs étaient attirés par la dette périphérique car elle offre des rendements intéressants, en comparaison avec les rendements proches de zéro proposés par les pays cœur de la zone euro. Pour certaines émissions, le montant demandé par les investisseurs était cinq fois supérieur à la taille de l’émission. Les craintes d’un ralentissement économique et la faible probabilité de remontée des taux de la BCE poussent les investisseurs à acheter de la dette souveraine pour bénéficier du portage.

Actuellement, les spreads portugais, et les spreads espagnols dans une moindre mesure, évoluent sous leur moyenne de long terme, ce qui suggère que leur dette est chèrement évaluée. Ce n’est pas le cas des spreads italiens. Le marché continue en effet d’intégrer une prime de risque à l’Italie du fait de la fragilité de ses fondamentaux (croissance faible, dette et déficit élevés) et du risque politique. La campagne pour les élections européennes pourrait amener un regain de tension, tout comme l’élaboration du budget 2020, qui pourrait générer aussi bien des tensions internes entre les deux leaders, que des tensions avec l’Union européenne. Il n’est pas exclu que l’on reparle de procédure de déficit excessif, mais nous n’accordons qu’une probabilité faible à ce qu’elle soit effectivement déclenchée.

En conséquence, la cherté des dettes portugaises et espagnoles et les risques probablement croissants sur la dette italienne ne nous incitent pas à avoir une opinion positive sur la classe d’actifs. La volatilité attendue sur la dette italienne présentera des opportunités d’achat en fonction des profils de risque. Le risque de défaut devrait rester très bas. Aussi, il serait excessif d’être négatif sur la dette périphérique puisque la BCE reste en soutien, que la croissance économique devrait s’améliorer au second semestre et que les rendements sont relativement attractifs en comparaison des rendements offerts par les autres pays de la zone euro. Nous sommes donc neutres sur la dette périphérique.