Devises scandinaves: Opter pour la prudence

EN UN MOT :
Tandis que les économies scandinaves résistent aux vents contraires, la devise norvégienne (NOK) s’est brutalement dépréciée et déconnectée de ses fondamentaux traditionnels. Le même constat peut être fait pour la devise suédoise (SEK). Dans un contexte de visibilité réduite, nous passons de positif à neutre sur ces deux devises.
Des exceptions européennes
Les économies norvégienne et suédoise font figure d’exception face à la zone euro embourbée dans un ralentissement économique dont elle peine à sortir. Les deux pays font d’ailleurs partie des rares économies européennes à avoir conservé leur notation souveraine AAA.
Selon nos dernières prévisions, la croissance norvégienne (hors activités pétrolières et transport maritime) devrait atteindre un point haut cette année à 2,3%, contre 1,1% en zone euro. Le compte courant et la balance fiscale devraient continuer d’enregistrer un large surplus. La consommation continuerait de croitre, soutenu par la progression des salaires réels qui ont été dopés par un taux de chômage particulièrement bas (2,1% en octobre). L’indice des prix à la consommation a diminué au T3 mais l’inflation sous-jacente reste soutenue, fluctuant au-dessus de la cible (2%) et devrait se maintenir en 2020. Dans ce contexte de forte activité domestique, la banque centrale a augmenté les taux d’intérêt à quatre reprises sur les 13 derniers mois mais a récemment laissé entendre que les taux directeurs resteraient inchangés à 1,50% pour la période à venir. Alors que le différentiel de taux, en particulier pour les taux d'intérêt réels (déduits de l’inflation), a été un bon indicateur des mouvements de la NOK, l’affaiblissement récent de la couronne semble quelque peu déconnecté du resserrement monétaire.
Les fondamentaux de la Suède restent robustes bien que l’activité ait enregistré une légère décélération. La dynamique tend davantage vers une normalisation de la situation économique après une période de forte croissance. Le marché du travail devrait connaitre un développement positif en 2019. Le taux d’emploi a atteint des niveaux historiquement hauts, soutenant la progression des salaires. Les comptes extérieurs et budgétaires resteraient positifs cette année tandis que le ratio dette-sur-PIB se réduirait. Dans un contexte de hausse de l’inflation en 2018, la banque centrale augmenta les taux directeurs en décembre dernier. Malgré le léger repli de l’inflation observé cette année dans un environnement de fortes incertitudes mondiales, l’autorité monétaire a annoncé une probable hausse de taux pour la fin de l’année, avant de laisser les taux d’intérêt stables à pour une période prolongée.
Quelques signes d’essoufflement
Face à un contexte de croissance mondiale morose, la Suède a d’ores et déjà amorcé une normalisation de sa dynamique économique. La croissance a notamment été ralentie par un faible développement de la demande domestique au premier semestre, illustré par une baisse de l’indice de confiance des consommateurs. Les perspectives du secteur manufacturier seraient elles aussi modérées, en témoigne la chute récente du Purchasing Manager Index manufacturier. Malgré une forte croissance en 2019, le voisin norvégien pourrait aussi pâtir de la conjoncture moins favorable. Le différentiel de croissance avec la zone euro devrait légèrement diminuer dû au ralentissement de la dynamique norvégienne. Les investissements dans le secteur pétrolier déclineraient après avoir connu une forte hausse depuis 2018. L’investissement total suivrait la même tendance, découragé par les incertitudes à l’égard des perspectives de la demande mondiale. Par ailleurs, l’indice de Surprise Economique indique un retournement récent à l’avantage de la zone euro. La même observation peut être faite pour la Suède (cf. graphiques ci-dessous).


L’environnement mondial aurait fortement pesé sur les devises scandinaves
L’analyse technique suggère une prudence accrue. L’EUR/NOK (valeur de 1 euro) est passé au-dessus de la moyenne mobile 200 jours en août dernier. La valeur a même dépassé les niveaux records précédents. Le même constat peut être fait pour la SEK. De plus, les moyennes mobiles sont croissantes, surtout pour l’EUR/NOK. La moyenne mobile 200 jours de l’EUR/SEK est en croissance moins forte et le niveau actuel se situe entre les deux moyennes mobiles. Ceci est donc moins inquiétant pour la devise suédoise.


Nous révisons nos recommandations
Très récemment, le sentiment de marché semble s’être amélioré et l’appétit pour le risque reprendrait graduellement. Malgré ce, nous modifions notre opinion à neutre pour la couronnes norvégienne et suédoise, au vu du manque de visibilité. Nous abaissons également nos cibles court et moyen-terme, respectivement à 10,20 à 3 mois et à 9,80 à 12 mois pour la NOK et à 10,60 puis 10,50 pour la SEK (valeur pour 1 euro). Bien que plus faible, nous continuons de croire en leur potentiel d’appréciation compte tenu de la résilience des fondamentaux économiques.