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Âge d’or pour les métaux précieux et les producteurs miniers

Patrick Casselman, Commodity Strategist, BNP Paribas Wealth Management, Belgium et Stephan Kemper, Chief Investment Strategist BNP Paribas Wealth Management - Private Banking Germany

Augmentation de nos objectifs de prix pour l’or et l’argent

Après une période de consolidation de quatre mois dans une fourchette comprise entre 3 200 USD et 3 430 USD, le cours de l’once d’or a enregistré une rupture technique fin août, marquant ainsi de nouveaux records historiques (voir graphique 1)

 Les principaux moteurs sont :

1) La probabilité accrue de baisses de taux par la Fed, suite à des rapports sur l’emploi américain plus faibles que prévu.

2) Une recherche accrue de valeurs refuges liée aux incertitudes géopolitiques et financières : annulation par la Cour suprême des décisions tarifaires de l’administration Trump, interrogations sur l’indépendance de la Fed face aux pressions politiques, et inquiétudes croissantes quant à la soutenabilité des déficits budgétaires et de la dette américaine.

3) Les achats continus d’or par les banques centrales, qui diversifient leurs réserves en s’éloignant des actifs libellés en USD.

4) Un affaiblissement du dollar.

 

La phase de consolidation est terminée

Au début du mois de mai, dans le sillage d’un fort rebond du cours de l’or, nous avons abaissé notre opinion de Positive à Neutre. Cette révision s’appuyait sur l’hypothèse que le pic d’incertitude avait été atteint, notamment en lien avec une désescalade de la guerre commerciale et l’ouverture de pourparlers de paix concernant les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient. Ces éléments auraient pu entraîner une phase de consolidation ou une légère correction du prix de l’or. Depuis, si certaines tensions commerciales se sont atténuées grâce à la signature d’accords partiels, aucun progrès significatif n’a été enregistré sur le front diplomatique, que ce soit entre la Russie et l’Ukraine ou au Moyen-Orient. Alors que la demande en provenance du secteur de la joaillerie s’essouffle (le métal jaune devenant moins accessible), l’or bénéficie d’un regain d’intérêt marqué de la part des investisseurs. En toile de fond : des tensions géopolitiques persistantes et une accumulation d’incertitudes politiques, allant de la dédollarisation aux doutes sur l’indépendance de la Fed, en passant par les inquiétudes liées aux déficits budgétaires américains et à la trajectoire de la dette, sans oublier le spectre d’un retour de l’inflation aux États-Unis.

Dans ce contexte, la demande d’investissement reste soutenue, tandis que l’offre progresse lentement. Combinée à une configuration technique favorable — après la récente cassure haussière — cette dynamique nous conduit à rehausser notre objectif de prix pour l’or de 3 500 USD à 4 000 USD, et à revenir à une opinion Positive sur le métal précieux. 

Les métaux précieux dans leur ensemble bien orientés

Nous maintenons également une opinion Positive sur les autres métaux précieux. Depuis le début de l’été, les prix de l’argent et du platine ont fortement rattrapé leur retard, en raison d’un effet de substitution de l’or dans le marché de la joaillerie et d’une offre plus restreinte.

Par ailleurs, la demande industrielle continue de croître dans les secteurs de l’électronique, des panneaux solaires, de l’aérospatiale, des centres de données, des électrolyseurs, etc. Nous anticipons que ces marchés resteront en situation de déficit offre/demande pendant un certain temps, ce qui soutiendra davantage les prix.

En cohérence avec notre révision à la hausse du prix cible de l’or et en tenant compte d’une correction progressive du ratio or/argent, passant de +/-90 à +/-80, nous augmentons notre objectif de prix à 12 mois pour l’argent de 45 USD à 50 USD, tout en confirmant notre opinion Positive.

Potentiel de hausse supplémentaire pour les producteurs d’or malgré une forte progression

Les sociétés minières de métaux précieux figurent parmi nos convictions fortes depuis septembre 2024. Nous estimons que la hausse anticipée par nos stratèges en matières premières devrait stimuler la rentabilité de ces entreprises. Cette amélioration des perspectives de bénéfices devrait également permettre une révision à la hausse des valorisations.

Depuis cette recommandation, l’indice NYSE Arca Gold Miners (AGM) a progressé de 88 %, et l’indice Solactive Global Silver Miner (GSM) a même bondi de 113 % (en USD au 09/09/25 / voir graphique 2). Fait intéressant, le ratio cours/bénéfices (P/E) de l’indice AGM est resté pratiquement inchangé malgré cette forte performance : il était de 13,6 au moment de notre recommandation et se situe désormais à 14,3. La revalorisation de l’indice GSM a été légèrement plus marquée, avec un P/E passant de 18,8 à 20,4. Ces niveaux ne semblent pas excessifs, car ils sont soit en ligne avec leur moyennes historiques (indice GSM), soit inférieurs (indice AGM) (voir graphique 3).

Perspectives de croissance des bénéfices

Les sociétés minières ont généralement une part importante de coûts fixes dans cette industrie à forte intensité d’actifs. Elles doivent effectuer un entretien régulier des mines pour assurer leur fonctionnement, et les machines doivent être disponibles et en état de bon fonctionnement, quel que soit le niveau d’utilisation. Cela leur confère un fort levier opérationnel (c’est-à-dire l’élasticité du résultat par rapport au chiffre d’affaires). Bien que la relation ne soit pas linéaire, chaque dollar supplémentaire généré par la hausse des prix augmente significativement les bénéfices avant impôts. Ainsi, cette hausse des prix (prévue par notre équipe de stratégie en matières premières) devrait offrir un coup de pouce supplémentaire aux bénéfices.

D’après la relation la plus récente entre le prix de l’or et les bénéfices, nous constatons qu’entre 2023 et aujourd’hui, les bénéfices ont augmenté en moyenne 2,84 fois plus vite que le prix de l’or lui-même.

En appliquant notre prévision de prix de l’or et en ajustant l’estimation actuelle du consensus des bénéfices avec un multiplicateur défensif de 2,5, nous obtenons une hausse supplémentaire de 30 % pour l’indice, liée à l’augmentation des bénéfices.

En appliquant la même méthodologie au GSM (Solactive Global Silver Miners Index), nous constatons une plus grande dispersion dans la relation entre la croissance des bénéfices et celle du prix de l’argent (facteur de 3 en 2024 et 8,6 en 2025). Cela indique que le prix de l’argent a atteint un point d’inflexion en matière de rentabilité au cours des 12 derniers mois. Il semble donc approprié d’appliquer un multiplicateur plus faible pour nos calculs prospectifs.

En acceptant le niveau élevé de 8,6 pour 2025 tout en appliquant 2,5 (en ligne avec ce que nous avons utilisé pour l’or) pour l’année prochaine, nous obtenons une hausse théorique du prix d’environ 30 %.

Hypothèses des calculs

Ces calculs supposent que les prévisions actuelles de bénéfices sont liées aux prévisions du consensus Bloomberg pour le T2 2026 (Or : 3 400 USD/once - Argent : 38 USD/once) et un ratio P/E stable.

Bien entendu, ces calculs sont très simplifiés et doivent être considérés comme tels. Cependant, ces chiffres restent conservateurs par rapport à la tendance à long terme.

Au cours des 10 dernières années, le prix de l’or a augmenté de 229 %, tandis que les bénéfices de l’indice AGM (NYSE Arca Gold Miners) ont bondi de 1 090 % (soit un facteur d’environ 4,8). En ce qui concerne l’argent, le facteur depuis 2019 est plus faible, à environ 1,4. Bien que cela semble moins encourageant, il convient de noter que les bénéfices en 2021 étaient presque deux fois plus élevés qu’aujourd’hui (BPA de 17,5 début 2021 contre 9,7 aujourd’hui), alors que l’argent se négociait entre 25 et 30 USD/once. Ces chiffres ne sont pas destinés à être des prévisions exactes, mais à donner une idée approximative du potentiel de hausse que les investisseurs pourraient envisager selon nos prévisions actualisées. Nous réitérons notre recommandation de surpondération sur les sociétés minières de métaux précieux.