#Investissements — 04.10.2018

Des modifications dans la classification sectorielle

Guillaume Duchesne

Les indices sectoriels de MSCI et S&P subiront un changement d’ampleur à l’automne. Tandis que S&P a déjà fait basculer ses indices le 28 septembre, MSCI adaptera sa classification le 3 décembre prochain.

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Quels sont ces changements ? 

La modification de la taxonomie sectorielle « Global Industry Classification Standard » (GICS®) impliquera une refonte complète du secteur des télécommunications en « services de communication ». Ce nouveau secteur combinera : 

  1. Les valeurs des services de télécommunication du type Orange, AT&T,…

  2. Les valeurs médias (publicité, radiotélévision, câble & satellite, films et divertissement, édition), auparavant classées dans la consommation cyclique.

  3. Les services internet – notamment Alphabet et Facebook - issus du secteur de la Technologie (logiciels et services internet) qui seront rejoints par Netflix et Tripadvisor, initialement classés dans la consommation cyclique (vente au détail). 

Pourquoi une telle transformation ? 

Les changements de classification sectorielle sont rares (le dernier a été effectué il y a deux ans avec l’introduction d’un onzième secteur, l’immobilier). La taxonomie ancienne nécessitait un toilettage afin de tenir compte des évolutions économiques et financières. En effet, la façon dont les gens communiquent, accèdent au contenu de divertissement et à d'autres informations a très vite évolué en une décennie. Les entreprises de télécommunication, de médias et d'internet se sont rapprochées, en procédant à des fusions et des acquisitions, souvent nécessaires dans un environnement de forte compétition. Bon nombre d'entre elles offrent maintenant des services groupés tels que le câble, les services Internet et les services téléphoniques, voire pour certaines également du contenu de divertissement. 

Par ailleurs, la technologie est devenue, au fil des années, un secteur au poids conséquent dans les indices, en particulier aux Etats-Unis (26% du S&P500). L’industrie « logiciels et services internet » était notamment moins pertinente, les entreprises y ayant des métiers parfois très disparates. De ce constant est née la volonté de faire le tri : 

  • Les sociétés de commerce online comme Ebay ou encore Alibaba sont à présent classées dans l’industrie de la distribution avec Amazon (consommation discrétionnaire). Elles ne font effectivement qu’utiliser la technologie pour faire du commerce, mais ne peuvent être répertoriées comme purs acteurs technos.

  • Les services internet (Facebook, Alphabet, Tencent, Twitter, Yahoo!) sont inclus au nouveau secteur « services de communication ».

  • Les activités d’infrastructure cloud (Shopify) sont à l’inverse maintenues dans le secteur de la technologie au sein de la sous-industrie « services internet et infrastructure ». 

Quelles sont les conséquences de ce changement de taxonomie? 

Un requilibrage significatif entre les secteurs 

Le poids de la technologie et de la consommation discrétionnaire diminuera dans la nouvelle nomenclature. Au sein de l’indice S&P500, le secteur de la technologie passera de 26% à 20%, la consommation discrétionnaire de 13% à 10% tandis que les services de communication représenteront 11% (contre 2% pour les télécoms dans l’ancienne classification) et deviendront le quatrième secteur derrière la technologie, les soins de santé et les financières. 

Compte tenu de la faible présence de valeurs internet en Europe, les changements y seront moins spectaculaires : le poids des technologies sera quasiment inchangé (environ 5%) et les services de communication pèseront pour moins de 5% dans l’indice Stoxx 600 (contre 2% pour les télécommunications). 

Un recentrage de la technologie sur son métier initial 

Le secteur de la technologie sera davantage orienté vers les fabricants de semi, le hardware et les logiciels. Aux Etats-Unis, son profil en tant que secteur de croissance tendra à s’affaiblir, avec un P/E sectoriel en baisse tandis que la croissance des bénéfices pour 2018 passera de 20% à 17%. Le taux de rendement diminuera légèrement (à 1%). 

Un rôle renforce de certaines valeurs 

Certains secteurs se concentreront davantage sur quelques grands noms. Apple pour la technologie, Amazon pour la consommation discrétionnaire et Facebook et Alphabet pour les services de communication. Apple aura par exemple une position encore plus dominante au sein du secteur technologique, représentant 20% de l’industrie (contre 15% dans l’ancienne nomenclature). 

Les services de communication, un nouveau secteur plus cyclique 

Aux Etats-Unis, près de la moitié de ses composantes proviendront de la technologie. Le reste sera constitué d'entreprises des médias et télécommunications. En conséquence, le nouveau secteur : 

  1. sera beaucoup plus cyclique que le secteur initial des télécommunications. Il sera beaucoup plus corrélé à la technologie et à la consommation discrétionnaire.

  2. aura une volatilité supérieure à la moyenne et offrira un rendement estimé de 1,3% (contre 5% pour le secteur des télécommunications).

  3. aura un beta plus élevé que dans sa forme précédente. 

En Europe, le caractère cyclique du secteur sera toutefois moins marqué. Les valeurs proviendront essentiellement des télécoms (60% des valeurs du secteur contre seulement 20% aux Etats-Unis) tandis les services internet y seront quasiment inexistantes (seulement 3% des valeurs du secteur). 

Quels sont les impacts sur les fonds d’investissement actifs et passifs ? 

Le changement aura des conséquences essentiellement sur les fonds en gestion passive, les gérants actifs pouvant continuer à investir dans les valeurs de leur choix. Les gérants indiciels, quand ils sont concernés (fonds sectoriels), devront ajuster leurs positions compte tenu de la modification de leur indice de référence. Il en résultera d’éventuels arbitrages, parfois sur des valeurs à grande capitalisation, et donc une possible progression de la volatilité au moment du basculement de la classification. La plupart des valeurs technologiques et services internet étant américaines, le marché US sera le premier concerné. 

A noter également que tous les ETFs ne suivent pas la norme sectorielle GISC. En conséquence, sous une même dénomination, le sous-jacent dans certains secteurs (technologie, notamment) pourra parfois être très variable d’un fonds à l’autre.