Une nouvelle phase d’aversion au risque après la réunion de la Fed
Les craintes liées à la croissance vont peiner à se dissiper. Mais quand cela se produira, le marché des actions se relèvera. Dans l'intervalle, la volatilité restera élevée.
Une hausse conciliante des taux de la Fed?
Les investisseurs s'attendaient à ce que la Réserve fédérale (Fed) opère une hausse des taux, ainsi qu'une modification de ses indications. Sans surprise, les responsables politiques ont décidé d'augmenter les taux d'intérêt mercredi. A la satisfaction des observateurs, ils ont également revu à la baisse le nombre de hausses attendues en 2019 de trois à deux. En ce qui concerne leurs commentaires sur l’orientation à venir de leur politique, le changement a été marginal : le mot « quelques » a été ajouté à « d’autres hausses graduelles à venir de la fourchette des taux directeurs ». Ce qui a troublé les investisseurs, c'est qu'au cours de la conférence de presse la Fed a décrit le processus de normalisation du bilan comme étant « en pilotage automatique ». Le rendement des bons du Trésor à 10 ans a immédiatement réagi en baissant de 2,83 % à 2,75 % et l'indice S&P500 a effacé les modestes gains de la matinée en clôturant en baisse de 1,5%. Le Topix a perdu 2,5 %, le MSCI Emerging Market 0,9 % et l'Euro Stoxx était en baisse de 1,8% à l’ouverture des marchés. Le dollar pondéré des échanges commerciaux a initialement progressé, puis a perdu du terrain lors de la session de négociation du jeudi matin. Le prix du pétrole n'a pas échappé à la hausse de l'aversion au risque. Le prix du Brent a chuté en dessous de 56 USD.
Les craintes sur la croissance mondiale s'intensifient
La Réserve fédérale a ainsi amplifié les craintes de croissance existantes. D'autres inquiétudes récentes ont été provoquées par la Banque centrale européenne - qui a dégradé ses perspectives de croissance et d'inflation, et a déclaré que « les risques évoluaient vers la baisse » - et la poursuite de la détérioration des indices PMI. N'oublions pas les faibles chiffres concernant la Chine où les ventes au détail ont atteint leur taux de croissance le plus bas depuis mai 2003, et la production industrielle qui est ressortie inférieure aux attentes.
Trop tôt pour craindre une récession
2018 marque l'année où la croissance mondiale a atteint son niveau le plus élevé depuis 2011. Dans ce contexte, les entreprises ont généré une croissance de 16 %. S'agissant de l'horizon 2019, nous tablons sur a) une bonne évolution de la consommation, soutenue par une hausse des salaires et la création d'emplois ; b) un intérêt pour les investissements dans les projets et les équipements, en particulier dans les transformations numériques ; c) l’implémentation par des pays tels que le Japon et la Chine de mesures de stimulation fiscale et d) sur une baisse limitée du commerce mondial. Dans l'ensemble, nous ne prévoyons pas de récession. Nous pensons plutôt que l'activité économique mondiale va se modérer, ce qui permettrait aux entreprises de continuer à générer une croissance des bénéfices.
Manque de catalyseurs à court terme et perspectives positives à moyen terme
Dans les mois à venir, les données économiques devraient confirmer que 2018 était effectivement l'année de pic de la croissance et les investisseurs vont rester inquiets sur l'ampleur du ralentissement. À un certain stade, ils parviendront à conclure que les craintes de récession sont exagérées, ce qui créera les conditions d'une tendance à la hausse des actifs risqués. Dans l'intervalle, la volatilité restera élevée.
Signes encourageants d’indicateurs de sentiment et d’indicateurs techniques
Quatre indicateurs ont récemment envoyé des signaux encourageants aux marchés. Le premier est l'écart entre les optimistes et les pessimistes dans le sondage de l'American Association of Individual Investors, à savoir un écart de 28 points de pourcentage en faveur des pessimistes. La dernière fois que cela s'est produit était début janvier 2016, quand une nouvelle phase haussière se mettait en mouvement. Le deuxième indicateur est l'indice de confiance des investisseurs de State Street, qui a baissé à des niveaux historiquement bas, en ligne avec les niveaux de début de 2009, lorsque le marché haussier actuel avait commencé, ou avec les niveaux atteints à la fin de 2012, après les fameuses paroles de Mario Draghi concernant la volonté de la BCE « de faire tout ce qui est nécessaire ». Le troisième indicateur est le nombre de valeurs évoluant au-dessus de la moyenne mobile à 200 jours, qui se situe aujourd'hui autour de niveaux qui correspondent généralement à de bons points d'entrée sur les marchés actions. La même observation peut être faite sur le quatrième indicateur : le rapport entre les nouveaux sommets et les nouveaux points bas atteints.
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“Ce n’est pas la fin du marché haussier
En conclusion, une récession n'est pas à l'horizon, ce qui permettra aux bénéfices de rester sur une trajectoire de croissance. Dans un proche avenir, les données macroéconomiques maintiendront les investisseurs sur leur garde, car ils confirmeront que 2018 fut l'année de croissance record. Ce n'est qu'au cours d'une seconde phase qu'ils seront en mesure d’être rassurés et permettront ainsi une dynamique positive sur les marchés actions de se développer. Dans l'intervalle, la volatilité restera élevée. Les indicateurs techniques et de confiance démontrent que nous en sommes déjà à un stade tardif de la correction des marchés actions. La patience est de rigueur. Le marché haussier n'a pas encore pris fin."
Roger KELLER
Chief Investment Advisor