#Articles — 22.01.2020

Recommandation positive sur le secteur de l’énergie, trop décoté

Alain Gerard

Le secteur de l’énergie a été relativement morose l’année passée. Il enregistre la pire performance sectorielle dans le MSCI US et la deuxième pire performance du MSCI Europe. 

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Sous-performance en 2019

Le secteur de l’énergie a été relativement morose l’année passée. Il enregistre la pire performance sectorielle dans le MSCI US (+7.43% contre +29.07% pour le MSCI USA) et la deuxième pire performance du MSCI Europe (+3.73% contre +22.24% pour le MSCI Europe). Outre des incertitudes quant à la croissance économique mondiale et à une certaine érosion de la demande de pétrole, on a constaté tout au long de l’année des flux de fonds sortants de ce secteur considéré peu ‘socialement responsable’ pour aller vers des industries jugées plus ‘propres’.

Les résultats du premier semestre 2019 y furent décevants en général. Les prix du pétrole, tout comme d’autres matières premières, étaient dans une tendance baissière de mai à octobre suite aux tensions commerciales et au ralentissement de la croissance économique mondiale. Les marges étaient sous pression, particulièrement dans la pétrochimie et le raffinage. Et les prix du gaz ne se reprennent pas (ils ont d’ailleurs atteint de nouveaux plus bas en ce début d’année 2020). Mais les résultats du secteur énergétique au 3T19 furent plus conformes aux attentes, quoique déprimés.  

L’énergie: une des dernières poches ‘Value’

L’industrie fossile est maintenant la moins chère de la cote, avec l’automobile et les bancaires, ces deux dernières industries souffrant aussi de problèmes structurels.

Le secteur traite à des niveaux attractifs, surtout en Europe: ratio cours/bénéfices 2020 : 10,9x. C’est une décote de 24% par rapport au MSCI Europe et plus qu’une déviation standard par rapport à sa décote historique moyenne vis-à-vis du marché. D’autres indicateurs de valorisation tels que le ratio cours/ valeur comptable ou le rendement du dividende mènent à une conclusion semblable. De manière générale, les dividendes ne sont pas à risque car ils sont adossés à d'importants flux de trésorerie disponibles. Aux Etats-Unis, la décote est moins prononcée mais tout de même: le secteur de l’énergie y traite à un ratio cours/ bénéfices de 17.5x contre 18.8x pour le MSCI USA (données au 31/12/2019).

Dès lors, cette nouvelle recommandation sectorielle s’intègre parfaitement dans notre call ‘Value’/ actions bon marché que nous avons lancé au quatrième trimestre de l’année passée.

Au niveau de l’offre de pétrole, nous observons de nombreuses ‘disruptions’ et contrôles : 1. les Américains commencent à être plus disciplinés en matière de production de pétrole de schiste et ont fortement diminué l’exploitation des gisements en perte ; 2. l’OPEP - en particulier la Russie et l’Arabie Saoudite - semblent respecter la nouvelle baisse de quotas (-500.000 barils par jour) annoncée début décembre ; 3. nombreuses tensions au Proche et au Moyen-Orient (Arabie Saoudite, Iraq, Iran, Libye, Syrie…).

Une couverture contre le risque d’un nouvel embrasement au Proche-Orient

Nous sommes étonnés de la vitesse à laquelle le marché semble ‘tourner la page’ après l’élimination du Général iranien Al Soleimani. Une faible prime de risque est incorporée dans les cours du pétrole. Il est probable que dans plusieurs pays de la région, les ‘escarmouches’ récentes ne soient que les prémices de conflits plus importants à venir (même si nous ne le souhaitons évidemment pas). En particulier, il est probable que les chiites de plus en plus unis d’Iran et d’Iraq (et de Syrie, voire du Yémen?) feront tout pour que les Américains quittent la région, ce qui a d’ailleurs été voté au parlement iraquien. D’autres tensions s’enveniment ou se réaniment en Libye, en Syrie, etc.

Ainsi, contre un possible nouvel embrasement de la région qui pourrait avoir des répercussions mondiales, il nous paraît nécessaire de couvrir son portefeuille de placements, surtout après les excellentes performances des marchés d’actions en général en 2019. L’or est une possibilité mais a déjà fort monté. Un autre hedge que nous jugeons approprié aujourd‘hui est le secteur énergétique.

Des facteurs techniques se rajoutent à notre call fondamental

Le secteur énergétique, suite à des sorties incessantes de fonds en 2019 (voir ci-dessus), à son faible momentum, aux résultats des sociétés pétrolières assez décevants en 2019, et au fait qu’il représente maintenant un poids fort limité dans les indices, est aujourd’hui le secteur le plus sous-pondéré dans les portefeuilles globaux. Tout rééquilibrage provoquerait des flux de fonds considérables en sa faveur. La rechute récente des prix nous semble donc un bon point d’entrée sur le secteur. 

Les grosses sociétés pétrolières génèrent tellement de cash, qu’outre de beaux dividendes, elles peuvent maintenant lancer des plans importants de rachats d’actions ou de désendettement afin d’optimiser leurs bilans.

Les services pétroliers

A l’analyse des résultats de Schlumberger publiés ce 17 janvier 2020, il semble que le pire est passé pour cette industrie. Quoiqu’une forte reprise des projets n’est pas attendue à court terme, il est clair qu’avec les sous-investissements notoires dans le secteur ces dernières années, tout rebond des prix du pétrole mènerait à de nouveaux projets juteux pour les services pétroliers et à une explosion des marges. Il est sans doute temps, là aussi, de se ré-intéresser à cette industrie qui, dans certains cas, paye même de bons dividendes!