Voir la reprise chinoise au-delà de la Chine

Points clés
1. L'économie chinoise semble en difficulté. Les défis de la croissance chinoise semblent plus structurels que cycliques. En outre, la confiance des investisseurs diminue. Pékin doit renforcer son soutien à l’économie pour restaurer la confiance des consommateurs, des entreprises et des investisseurs. Nous anticipons davantage de réformes et de stimuli, dans la lignée des mesures en faveur de la croissance adoptées lors de la dernière réunion du Politburo, l’instance dirigeante du Parti Communiste chinois.
2.Pour s'exposer aux actions chinoises, nous proposons des solutions structurées et des options d'achat pour bénéficier de la hausse tout en limitant les risques de perte. Nous apprécions les paniers d’actions thématiques et les secteurs chinois moins soumis aux contrôles réglementaires, comme la consommation de base et discrétionnaire, le tourisme, les communications et la santé. La technologie chinoise, très malmenée, est bon marché.
3.Les investisseurs peuvent également envisager de s’exposer à la Chine de manière indirecte, via des pays, secteurs et industries qui y sont fort exposés. En Asie, nous apprécions la Corée du Sud, le Japon et l'Indonésie. Sur le plan sectoriel, essayez de vous exposer aux secteurs qui se reprennent, notamment la consommation, les voyages & loisirs, les matières premières (en particulier celles nécessaires à la transition énergétique), l'IA, les semi-conducteurs et le thème de la relocalisation de proximité, que l’on peut jouer via l'automatisation ou la robotique.
4.En dehors de l'Asie, nous pensons que l'Amérique latine bénéficiera de la croissance rapide des échanges commerciaux avec la Chine. Les matières premières connaîtront une forte demande au cours des prochaines années. Le Brésil devrait tirer son épingle du jeu, tout comme le Mexique, le Pérou et le Chili.
5. À l'échelle mondiale, les secteurs de l'énergie, des matériaux et du luxe surperforment généralement lorsque l'économie chinoise accélère.
Divers fonds actifs, indices, trackers et produits structurés peuvent permettre de s’exposer de manière diversifiée aux secteurs, thèmes, régions et pays mentionnés ci-dessus avec éventuellement un certain niveau de couverture/protection.
Pourquoi la reprise chinoise est-elle à la traîne?
L'économie chinoise semble en difficulté même après le revirement surprenant de la politique zéro-Covid en fin d’année dernière. Le déconfinement plus rapide que prévu qui en a résulté a initialement contribué à relancer une économie morose, mais le coup de pouce a été de courte durée car les défis de croissance actuels de la Chine semblent plus structurels que cycliques.
La reprise de la Chine n’est pas encore très solide, ce que confirment les récentes statistiques. Cet essoufflement atteste le besoin évident de mesures de relance.
Les derniers indices PMI suggèrent également un ralentissement dans les secteurs manufacturiers et des services. Le sentiment demeure négatif car les perspectives économiques restant moroses.
L’affaiblissement de la demande agrégée est désormais un problème urgent et l'économie chinoise semble proche de la déflation. Les sorties de capitaux des fonds d'investissement étrangers sont également préoccupantes, car la confiance des investisseurs reste faible ; ils préfèrent s'exposer par le biais de paris indirects. La faiblesse du renminbi accentue les difficultés.
Il est important de noter que des problèmes socioéconomiques majeurs persistent dans le pays. Le taux de chômage des jeunes a atteint un nouveau record de 21,3 %, tandis que le taux d'épargne des ménages avoisine son plus haut historique. Pékin doit fournir un soutien plus important pour restaurer la confiance des consommateurs, des entreprises et des investisseurs.
La croissance au cœur de la réunion du Politburo chinois
La réunion du Politburo du 24 juillet, qui a été suivie de près, a confirmé que les difficultés de l’environnement macroéconomique résulte essentiellement de la faiblesse de la demande domestique. De surcroît, la banque centrale a appelé à un renforcement des politiques macroéconomiques contracycliques dans le but d’augmenter la confiance, à un ajustement des politiques immobilières et à des mesures structurelles pour résoudre la crise de la dette des gouvernements locaux. Vu le sentiment très déprimé et les attentes très basses, les actions chinoises et le renminbi ont bondi au lendemain de l'annonce. Comme attendu, il n'y a pas de relance massive car Pékin préfère toujours des mesures ciblées, avec une politique fiscale et monétaire accommodantes. L'accent sera mis sur la demande intérieure, notamment la relance de la consommation par le soutien au revenu des ménages. L'automobile, les produits électroniques et les appareils ménagers, ainsi que la consommation de services tels que les sports, les loisirs, les activités culturelles et le tourisme seront davantage promus. Plus important encore, le Politburo a laissé tomber une phrase clé de son compte-rendu : « le logement est fait pour vivre, et non pour spéculer », signe d'un assouplissement significatif des restrictions dans le secteur immobilier.
Malgré le manque de détails, les hauts fonctionnaires ont clairement défini une orientation politique en faveur de la croissance. Des informations plus précises sur les politiques d'assouplissement suivront au cours des prochains mois.
Avec ces mesures de relance spécifiques, la Chine devrait atteindre son objectif de croissance annuelle de plus de 5 % cette année.
Toujours Positif sur les actions chinoises
Nous conservons une position légèrement haussière sur les actions chinoises au second semestre 2023 compte tenu des nouvelles mesures de soutien. Pour s'exposer aux actions chinoises, nous proposons des solutions structurées et des options d'achat pour bénéficier de la hausse tout en limitant les risques de perte. Nous apprécions les paniers d’actions thématiques et les secteurs chinois moins soumis aux contrôles réglementaires. Quels sont les niveaux de valorisations que les marchés financiers ont intégrés ? Sans surprise, les valorisations sont parmi les plus attractives à 10x les bénéfices prévisionnels, en particulier au regard du rebond des actions mondiales au S1 2023. La croissance du PIB chinois devrait être plus proche de 5,6 % en 2023, grâce aux mesures de soutien décrites précédemment.
Sur le plan sectoriel, nous continuons de privilégier les secteurs de la Chine continentale moins affectés par les contrôles réglementaires, tels que les grandes entreprises d’état notamment dans les secteurs de la consommation de base, de la consommation discrétionnaire, des communications et de la santé. Par ailleurs, nous pensons la technologie chinoise, très malmenée, est bon marché.
Nous privilégions également le tourisme domestique en Chine, grâce à la reprise de la demande. Néanmoins, le moral des investisseurs reste proche de son plus bas niveau, du fait d’une reprise économique inférieure aux attentes et des risques géopolitiques persistants. Les investisseurs restent prudents actuellement quant à une exposition directe sur le marché actions chinois. Cependant, il existe un potentiel pour l’investisseur patient.
Une Chine plus forte profite à l'Asie
Dans la perspective d'une reprise en Chine, les retombées de la croissance chinoise seront globalement positives, surtout pour l’Asie. Selon le Fonds Monétaire International (FMI), une hausse d’ 1% de la croissance chinoise fait augmenter la croissance des marchés émergents de 0,2 à 0,4%. Les économies asiatiques fortement exposées aux secteurs de la consommation et des services en Chine devraient en bénéficier le plus à mesure que le pays poursuit sa réouverture. L'importance du bloc ASEAN, en tant que partenaire commercial de la Chine, ne doit pas être sous-estimée. Nous pensons que les principaux canaux en sont les importations de biens, de services (le tourisme) et les matières premières.
1. Commerce : proximité et régionalisation sont les grands gagnants
L'Asie du Sud-Est a rapidement pris le relais en tant que premier partenaire de la Chine, suite à l'intensification du conflit commercial sino-américain qui a éclaté sous l'administration Trump. Pékin a été contraint de revoir sa chaîne d'approvisionnement mondiale. Depuis lors, la Chine a enregistré une forte croissance de ses échanges commerciaux avec les pays de l'ASEAN. En 2022, première année du Partenariat économique régional global (RCEP), les échanges ont augmenté de 15 % en glissement annuel. Aujourd’hui, l’ASEAN est le principal partenaire commercial de la Chine. Compte tenu des incertitudes à l’échelle mondiale, la reprise de la Chine peut soutenir les exportations asiatiques en cas de ralentissement. Ses principaux partenaires commerciaux sont Taïwan, la Corée du Sud, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Thaïlande, la Malaisie et les Philippines. Hong Kong et Singapour sont également des régions clés, car les plus exposées à la demande finale chinoise.
2. Tourisme : les voyages bénéficient à l'Asie
Après trois années de mise à l’arrêt, le retour des voyageurs chinois devrait soutenir le tourisme et bénéficier à l'ensemble de la région asiatique dans un contexte de perspectives moroses. L'Asie reste la destination la plus prisée des touristes chinois, notamment Hong-Kong, Macao, l'Australie, la Thaïlande, le Japon, la Malaisie, Singapour et l'Indonésie. En 2019, le tourisme représentait environ 10 % du produit intérieur brut de la région Asie-Pacifique et 10 % des emplois, selon le World Travel and Tourism Council. L’utilisation potentielle de l’épargne accumulée pendant ces trois années constituera un moteur pour les économies qui dépendent fortement du tourisme, comme Hong Kong et la Thaïlande.
3. Matières premières : la reprise va bénéficier aux exportateurs de matières premières
La reprise chinoise devrait soutenir la demande de matières premières, ce qui devrait à son tour bénéficier aux pays asiatiques exportateurs de ces dernières tels que la Malaisie, l'Indonésie et l'Australie. Néanmoins, les effets devraient être moins importants que lors des cycles précédents. En effet, la reprise devrait être davantage tirée par la consommation, par nature moins utilisatrice de matières premières, que les investissements en infrastructures qui ont précédemment soutenu la croissance chinoise.
4. Intelligence artificielle & Semi-conducteurs
Nous continuons également de privilégier la mégatendance de l'intelligence artificielle et surpondérons les semi-conducteurs depuis un certain temps. La Corée du Sud et Taïwan sont les pays les plus avancés dans le domaine des semi-conducteurs. Ils n’ont pas trop subi la faiblesse de la reprise chinoise, compte tenu de l’amélioration structurelle globale induite par l’IA. Nous apprécions aussi les valeurs japonaises liées à l’IA. Ces trois pays devraient bénéficier d’une reprise chinoise plus vigoureuse en raison de leur poids important en tant que partenaires commerciaux. Une part importante de leur production de puces est exportée vers la Chine !
5. Relocalisation de proximité
Dans le sillage des récentes crises et des perturbations des chaînes d'approvisionnement, les multinationales et les gouvernements ont pris conscience de leur dépendance excessive à la Chine en terme de production. Du fait du vieillissement de la population, le coût de la main d’œuvre a augmenté, impactant les coûts de production en Chine. Les entreprises occidentales cherchent à diversifier leurs sites de production, ce qui bénéficie à l’ASEAN et l'Inde, ainsi qu’à certaines sociétés de biens d'équipement, de robotique et d'automatisation.
Le potentiel des secteurs et industries mondiaux exposés à la Chine
Après un premier semestre en demi-teinte, nous pensons que l'activité économique chinoise devrait s'accélérer au second semestre 2023. Par conséquent, nous recommandons une exposition à la croissance et au développement de la deuxième économie mondiale. Lorsque la production se redresse, les secteurs de l’énergie et des matériaux ont tendance à en bénéficier le plus. Par ailleurs, ces secteurs ont enregistré des performances décevantes jusqu'à présent cette année.
La combinaison de a) une reprise de la demande; b) une offre mieux contrôlée ; c) un sous-investissement dans la production de matières premières ; et d) la réduction temporaire des exportations de pétrole par l’Arabie Saoudite pour réguler ce marché, devrait soutenir à terme une hausse du prix du pétrole.
Les grandes entreprises des secteurs de l'énergie et des matériaux affichent actuellement des bilans robustes, génèrent d'importants flux de trésorerie, versent des dividendes élevés et rachètent actuellement d'importantes quantités de leurs propres actions.
A court terme, nous privilégions les grandes compagnies pétrolières très bon marché ainsi que les entreprises exposées aux matières premières et aux infrastructures nécessaires à la transition énergétique et à l'électrification de l'économie, comme le cuivre, le nickel, le lithium et le cobalt. Par la suite, lorsque la reprise sera bien enclenchée, les secteurs de la chimie, de l'acier, des métaux et mines, du ciment et autres matériaux de construction pourraient connaître un vif rebond, compte tenu de leurs valorisations raisonnables. Les terres rares constituent également un pari intéressant, mais leur performance s'est avérée décevante compte tenu, entre autres, de l'atonie actuelle du marché des smartphones et des communications.
Il existe également des opportunités au sein des entreprises qui fournissent des infrastructures électriques de premier plan, toujours très prisées.
La réouverture des frontières et la reprise de la consommation stimulent la demande de produits de luxe, la Chine s’accaparant plus d'un tiers de la consommation mondiale de luxe. Elle devrait peser pour 60 % de la croissance de cette industrie d'ici 2030. Les groupes mondiaux de ce secteur affichent des taux de croissance et des marges bénéficiaires très impressionnants, même si un plateau pourrait avoir été atteint quant au pouvoir de fixation des prix (et donc quant à la marge opérationnelle).
Sous-performance des secteurs de l’Énergie et des Matériaux (assez corrélés à la Chine) mais très bonne performance du Luxe
Pays bénéficiant de la reprise chinoise
Comme nous l'avons vu plus haut, les économies asiatiques fortement exposées aux secteurs de la consommation et des services en Chine devraient tirer leur épingle du jeu. Les Chinois voyagent et dépensent à nouveau. Bien entendu, les économies asiatiques bénéficient également de leur propre réouverture et de la reprise des dépenses des consommateurs.
La Chine consomme environ la moitié des matières premières produites dans le monde chaque année. Les pays exportateurs de matières premières devraient en profiter si la reprise économique chinoise se confirme. L'Australie, l'Indonésie (un producteur majeur d'huile de palme, de charbon, de gaz, de pétrole, de cuivre, d'or, de caoutchouc, etc.) et la Malaisie (un important producteur de pétrole, d'aluminium, d'huile de palme, de fer, etc.) sont en bonne position pour tirer profit des énormes besoins de la Chine.
En dehors de l'Asie et de l'Océanie, l'Amérique latine a accéléré ses échanges avec la Chine : le Forum économique mondial a calculé que les échanges entre les deux régions ont été multipliés par 26 entre 2000 et 2020, passant de 12 milliards d’USD à 315 milliards d’USD. La Chine représente désormais 15% du commerce de l’Amérique latine et ce chiffre devrait dépasser 20% en 2035. Alors que le principal partenaire du Mexique demeurera les États-Unis, les échanges commerciaux entre certains pays d'Amérique latine (le Brésil, le Pérou, le Chili) et la Chine devraient représenter plus de 40% de leur commerce total en 2035.
Ces grandes nations productrices et exportatrices de matières premières devraient bénéficier de la croissance rapide de leurs échanges commerciaux avec la Chine qui, à son tour, accélère les investissements dans ces pays. Le Brésil (exportateur important de pétrole, de fer, d'acier, de produits agricoles, etc.) constitue un bon pari indirect pour s’exposer à la croissance à long terme de la Chine. Le Mexique bénéficie également de la relocalisation de proximité : certaines entreprises américaines préfèrent produire plus près de leur pays.
Le Mexique, le Brésil et l'Indonésie offrent un bon potentiel
Conclusion
La performance des actions chinoises a été décevante au premier semestre 2023 en raison d'une croissance atone et d'une prime de risque en hausse. Les plans de relance du pays devraient permettre d’accélérer la croissance du PIB au second semestre 2023.
Pour les investisseurs qui ne préfèrent pas investir en direct sur la Chine, nous suggérons d’envisager des investissements indirects, par le biais de pays, secteurs et industries qui y ont une exposition importante et en croissance. Ces investissements « indirects » peuvent constituer des alternatives intéressantes à un positionnement direct dans des valeurs chinoises.
Divers fonds actifs, indices, trackers et produits structurés peuvent permettre de s’exposer de manière diversifiée aux secteurs, thèmes, régions et pays mentionnés ci-dessus avec éventuellement un certain niveau de couverture/protection.