#Articles — 25.03.2020

COVID-19 : MISE A JOUR DU 25 MARS

Florent Bronès, Chief Investment Officer & Roger KELLER, Chief Investment Officer & Guy ERTZ, Chief Investment Advisor

Les marchés financiers connaissent ce matin du 25 mars un second jour de rebond (Eurostoxx +4,1% au moment de la rédaction, après une clôture du Nikkei à +8%).

BNP Paribas Wealth Management

La séance d’hier a été la meilleure sur les places boursières depuis octobre 2008 : S&P 500 +9,4%, MSCI World All Country Index +8,8%. Tous les indicateurs de risque se détendent, depuis la volatilité sur les actions (VIX et V2X en forte baisse) aux spreads de crédit en passant par l’or (once à 1.606$, -1,6%).

Pourtant, le flux de nouvelles négatives reste important. Sur le plan de la pandémie, l’Asie reste stable en nombre de cas. Le rythme de la progression de nouvelles infections ralentit en Europe, mais le nombre de décès demeure très élevé. Enfin, on constate une forte accélération du nombre de nouveaux cas aux Etats-Unis. Les laboratoires privés ont commencé les tests à grande échelle dans ce pays. L’Organisation Mondiale de la Santé a averti ; le prochain épicentre de la pandémie sera aux Etats-Unis. Surveillons tout particulièrement la situation dramatique dans l’état de New York. Près de la moitié des états américains ont pris des mesures de confinement, mesures pour l’instant légères par rapport à celles qui sont appliquées en Italie, Espagne ou France.

Sur le plan économique, les données publiées ne sont pas mauvaises, elles sont pires que cela. Les indices PMI (Purchasing Manager Index, indice des directeurs d’achat) de mars font état d’une très forte baisse dans l’industrie tant en Asie qu’en Europe. Les Etats-Unis sont moins touchés pour l’instant. On retourne sur des points bas historiques dans l’industrie, points bas déjà vus dans les dernières récessions. Par contre, les services s’enfoncent dans des territoires inconnus, avec des baisses jamais vues ! On n’a jamais connu un arrêt complet dans la restauration, quasi complet dans les compagnies aériennes ou l’hôtellerie. Le confinement dans les services a un impact immédiat et total.

Pourtant, les marchés ont rebondi hier, et continuent ce matin sur leur lancée. Le congrès américain a trouvé un compromis entre Républicains et Démocrates pour un plan de relance de 2 trillions de $. Les interventions massives des banques centrales commencent à réduire les tensions de liquidité sur les marchés, et notamment sur le dollar. Bref, une étape importante dans le comportement s’est produite. Les marchés financiers ne baissent plus à chaque mauvaise nouvelle, ils commencent à regarder plus loin que le court terme. Ce rebond de soulagement (« relief rallye ») est bienvenu, mais il pourrait n’être que transitoire tant que le pic de la pandémie n’est pas derrière nous, au minimum en termes de rythme d’augmentation des nouvelles infections.

Nous allons répondre succinctement dans la suite de cette mise à jour à trois questions qui nous ont été adressées.

Guy Ertz répondra aux deux premières questions et Roger Keller à la troisième.

1)     Toutes ces interventions massives des banques centrales et des gouvernements ne risquent-elles pas de générer le prochain cycle d’inflation globale ?

Sur le front de l'inflation, nous attendons un ralentissement à court terme et éventuellement à une phase temporaire de déflation sur une base mensuelle. Nous ne voyons pas de raison de s'inquiéter à ce stade d'une forte hausse de l'inflation au cours des prochaines années et ce malgré les nouvelles mesures de relance budgétaire et monétaire importantes. L'inflation s'accélère avant tout si la demande dépasse l'offre et ce de manière durable. On ne s'attend pas à une telle évolution. En effet, il faudra un certain temps avant que la vie quotidienne ne se normalise et que les mesures de relance affectent la demande. En outre, les gouvernements ont fait tout ce qui est possible pour éviter la faillite d'entreprises et le licenciement de travailleurs qualifiés. A terme, l'offre et la demande devraient se redresser en parallèle. A ce stade les anticipations d'inflation, telles que mesurées via les contrats de swap, restent à des niveaux très faibles et suggèrent plutôt un risque de déflation.

2)      Quelle est la situation conjoncturelle en Chine, pays en avance dans le confinement et donc dans la reprise d l’activité ?

Il sera en effet clé sera de suivre le rythme de la reprise économique en Chine, où la crise a commencé. Il existe des signes encourageants grâce aux indicateurs dits de haute fréquence, tels que la consommation quotidienne de charbon des six principaux générateurs électriques, les indicateurs de congestion du trafic dans les grandes villes, les ventes de surfaces commerciales etc. Ces indicateurs commencent à se normaliser depuis quelques semaines même si l’amélioration est assez graduelle. Pour plus détails voir aussi le Financial Times « Coronavirus tracked ».

3)     Après une baisse des bourses de 35% entre points hauts et points bas, où en est-on en termes de valorisation des grandes bourses ?

Les bourses mondiales ont perdu en moyenne 34% entre leurs plus hauts et leurs plus bas. Ont-elles atteint des niveaux de valorisation attrayants ?

Le S&P500 se traite à un PE 2020 de 14,9 fois sur la base des estimations bénéficiaires consensuelles. Cela paraît raisonnable, à priori. Ces estimations sont malheureusement bien trop optimistes et sont en cours de révision par la communauté des stratèges et analystes financiers, en raison de la crise sanitaire et de la récession qu’elle provoque.

Depuis les années 30, les bénéfices chutent en moyenne de 13% durant les récessions. Si nous appliquons cette norme, le S&P500 se traite alors à un PE 2020 de 18,5 fois. Ce n’est pas bon marché mais en ligne avec la moyenne de long terme.

La même analyse est valable pour l’ensemble des bourses mondiales, basée sur l’indice MSCI World All Countries débouche sur les multiples suivants : 14,7 fois et 17,3 respectivement. La même conclusion s’impose : les bourses mondiales ne sont pas bon marché mais se traitent à des valorisations en ligne avec la moyenne de long terme.

Une analyse des valorisations par le biais des ratios cours sur valeur comptable donne des conclusions similaires :

-          Ce ratio pour le S&P500 s’inscrit à 2,7, quasiment au milieu d’une fourchette historique entre 1,5 fois et 3,5 fois ex-période de la bulle technologique ;

-          Pour le MSCI World AC, nous avons 1,75 fois, également une valorisation proche de sa moyenne de long terme. Les bornes sont 1,20 fois pour la partie basse et 2,7 fois pour la partie haute (hors période de la bulle sur les valeurs technologiques).

Nous ne pensons pas qu’il soit raisonnable d’envisager un recul des valorisations des bourses vers leurs plus bas historiques car la récession actuelle est forte mais devrait être suivie par un fort rebond dès le second semestre, au gré de la normalisation de l’activité économique et de l’impact positif de la mobilisation sans précédent des autorités monétaires et des autorités élues.

Nous recommandons par conséquent de poursuivre une stratégie d’accumulation dans les prochaines semaines