Perspectives mensuelles sur les devises

Résumé
1.L'indice du dollar américain (DXY) est resté globalement stable en avril, tandis que l'indice de la zone euro (EXY) a gagné 1,5 %.
2.Aux États-Unis, l'incertitude est restée forte dans le secteur financier, notamment autour des banques régionales. Comme prévu, la Fed a relevé ses taux directeurs de 25 points de base (pb) le 3 mai et signalé une possible « pause » dans la hausse des taux. Les banques européennes se sont révélées solides. La hausse de 25 pb de la BCE le 4 mai a été suivie par un discours laissant entendre que d'autres hausses de taux pourraient suivre.
3.Nous augmentons nos objectifs pour l'EUR/USD (valeur d'un euro) car la dynamique économique et le différentiel de taux à 2 ans sont en faveur de l'euro. En outre, nous pourrions mettre fin à un cycle de huit ans de dollar fort avec une parité de pouvoir d'achat (PPA) estimée à environ 1,37. Suite a cela, nous augmentons notre objectif à 3 mois de 1,06 à 1,08 et notre objectif à 12 mois de 1,08 à 1,15.
4.Les cours du pétrole se sont stabilisés à des niveaux bien inférieurs. Cela a limité le potentiel d'appréciation des devises sensibles au pétrole telles que le CAD, l'AUD et la NOK.
5.La couronne norvégienne est la devise la moins performante du G10 depuis le début de l'année 2023, la Banque de Norvège adoptant une approche prudente en matière de hausse des taux. Le rebond attendu des prix du pétrole et les facteurs techniques continuent cependant à indiquer une appréciation de la NOK. Le différentiel de taux 2 ans poursuit son mouvement de hausse en faveur de l'Euro. Cela limitera le potentiel d'appréciation de la NOK. Ainsi, nous avons augmenté notre objectif à 3 mois de 10,6 à 11,3 et notre objectif à 12 mois de 10,3 à 10,8 (valeur d'un euro).
VUE USD >> CIBLE 12M VS EUR : 1,08
Potentiel haussier pour l'euro
L'EUR/USD s'est apprécié en avril et a franchi la barre des 1,10 (pour un euro). Les principaux facteurs positifs ont été le différentiel de rendement à 2 ans et la dynamique économique relative, tous deux favorables à l'euro. Certaines banques régionales montrent encore des signes de faiblesse. Cela n'a pas modifié la décision de la Fed de relever son taux cible de 25 pb le 3 mai, comme attendu. Cette annonce a toutefois été suivie d'une déclaration laissant entrevoir une possible « pause » dans la hausse des taux. Cependant, l’inflation sous-jacente- suivie de près par la banque centrale- a légèrement augmenté en avril à 5,5 %.
La hausse de 25 pb du taux directeur de la BCE le 4 mai devrait être suivie d'une nouvelle hausse en juin. La dynamique économique relative (enquêtes auprès des entreprises) a été favorable à l'euro et les termes de l'échange de l'UE se sont améliorés grâce à la stabilisation des prix de l'énergie (en particulier du gaz) aux niveaux observés en 2021. L’inflation sous-jacente de la zone euro était de 5,6% en avril, en légère baisse par rapport à son pic de mars. De plus, l'indice de surprise économique de l'UE est passé de 50 à 10, suggérant ainsi que les chiffres économiques sont toujours supérieurs aux attentes du marché.
Suite à ces changements, nous mettons fin à un cycle de huit ans de dollar fort, la parité de pouvoir d'achat (PPA) estime la juste valeur à 1,37 (valeur d'un euro). Ces facteurs laissent présager que l'euro dispose d'un potentiel d'appréciation plus important. À court terme, nous ne pouvons exclure un rebond temporaire du dollar.
Nous augmentons notre objectif à 3 mois de 1,06 à 1,08 et notre objectif à 12 mois de 1,08 à 1,15.
VUE GBP >> CIBLE 12M VS EUR : 0,88
Pas de tendance claire
L’EUR/GBP (valeur d'un euro) est resté stable depuis le début de l'année, à environ 0,88, principalement du fait de la combinaison de facteurs économiques et politiques au Royaume-Uni.
L'inflation est ressortie supérieure aux attentes en mars et avril à, respectivement, 10,4% et 10,1%. La hausse de 25 pb des taux de la Banque d'Angleterre en mars semble suffire à juguler l'inflation. Le 11 mai, la BoE a augmenté son taux bancaire de 25 pb à 4,5%, comme prévu.
L'indice PMI composite a progressé plus que prévu, à 54,9, ce qui indique une expansion de l'activité économique.
Les récentes fortes fluctuations de l'écart de rendement entre la zone euro et le Royaume-Uni semblent persister. L'euro et la livre sterling bénéficient de la baisse rapide des prix du gaz et des signes de croissance économique robuste. La livre sterling résiste face à l'appréciation globale de l'euro.
Nous conservons nos objectifs à 3 et 12 mois à 0,88 (valeur d'un euro).
VUE CHF >> CIBLE 12M VS EUR : 0,98
Le franc suisse devrait rester fort
L'EUR/CHF (valeur d'un euro) se négocie à un niveau proche de la parité avec une tentative de rupture de la parité fin avril. Il se négociait à 0,98 le 3 mai. Le franc suisse résiste à l'appréciation de l'euro.
L’inflation en glissement annuel pour le mois d’avril s'est établie à 2,6%, soit plus bas que prévu. C'est la plus forte baisse en près de trois ans, principalement dûe à la baisse des coûts de l'énergie. Cette décision pourrait ne pas suffire à empêcher la banque centrale de relever à nouveau ses taux d'intérêt en juin. Au 4 mai, les marchés tablaient sur une probabilité de 99% pour une hausse de 25 pb à la fin juin.
Dans l'ensemble, la BNS devrait relever ses taux un peu moins que la BCE au cours de l'année à venir, car l'inflation en Suisse reste nettement inférieure à celle de la zone euro.
Malgré la publication d'indicateurs économiques avancés du KOF (institut de recherche suisse) inférieurs aux attentes (96,4 en avril) et de l'indice PMI manufacturier (47), également inférieurs aux
attentes, les fondamentaux économiques de la Suisse restent globalement solides et le PIB devrait progresser d'un trimestre à l'autre.
Nous maintenons nos objectifs à 3 et 12 mois à 0,98 (un euro), ce qui suggère peu d’évolution par rapport à ses niveaux actuels (le 10 mai).
VUE JPY >> CIBLE 12M VS USD : 128
Appréciation du yen
Le yen s'est encore déprécié face au dollar ces dernières semaines, portant la valeur du yen à près de 135 au 10 mai.
Les prévisions de taux définitifs de la Fed ont été revues à la baisse suite à l'effondrement de la Silicon Valley Bank. Le nouveau gouverneur de la banque centrale japonaise (BoJ) K. Ueda devrait maintenir son YCC (contrôle de la courbe des taux) tout en adoptant une vue un peu plus sévère en élargissant sa fourchette de fluctuation au premier trimestre. Cela devrait soutenir le yen au cours des prochains mois. Le 28 avril, la réunion de la BOJ n'a pas débouché sur des décisions ni changements majeures.
La balance commerciale s'améliore depuis le début de l'année. Elle a été tirée par des exportations plus élevées que prévu et des importations moins importantes que prévu. La plupart de ces chiffres sont largement liés à la réouverture de la Chine.
A l'avenir, le rebond attendu du prix du pétrole devrait réduire l'excédent de la balance courante et limiter la hausse de la devise. La baisse de la demande japonaise d'actifs obligataires américains cette année devrait également soutenir la vigueur du yen.
Nous maintenons notre objectif à 130 sur 3 mois (valeur d'un dollar) et à 128 sur 12 mois.
VUE SEK >> CIBLE 12M VS EUR : 11
Potentiel d’appreciation modéré
La devise suédoise (SEK) a perdu du terrain contre l’euro en avril. Nous avons toutefois observé un rebond début mai.
Le 3 mai, la Riksbank a relevé son taux directeur de 50 pb à 3,5%. Le différentiel de taux d'intérêt à 2 ans favorise cependant l'euro depuis 2022.
Cependant, la principale préoccupation de la Suède reste le marché immobilier résidentiel, les taux d'intérêt ayant diminué la demande de logements en raison des taux hypothécaires. En conséquence, une hausse des taux pourrait aggraver la situation, notamment si l'on considère qu'environ 60% des prêts hypothécaires sont à taux variable. Ces difficultés persistantes pour la SEK laissent à penser que la paire ne devrait subir qu’une baisse limitée.
Les ventes au détail ont atteint un bas historique à -11,6% en année glissante en raison d'une inflation relativement élevée à 10,6% au mois d'avril (par rapport à l'an dernier), d'une hausse des coûts du crédit et d'un sentiment globalement négatif.
Les principaux facteurs mentionnés ci-dessus semblent en grande partie intégrés dans les cours à ce stade. Dans l'ensemble, nous ne voyons pas de tendance claire par rapport aux niveaux actuels pour les mois à venir.
Nous maintenons nos objectifs à 3 et 12 mois à 11 (valeur d’un euro).
VUE NOK >> CIBLE 12M VS EUR : 10,3
Moins de potentiel d’appréciation
La couronne norvégienne est la devise la moins performante du G10 depuis le début de l'année 2023. La monnaie norvégienne a cependant rebondi depuis début mai.
La faiblesse du mois d'avril peut être attribuée aux récentes turbulences sur les marchés et à la baisse des conditions de liquidité/de volatilité sur le marché des changes. La Norges Bank adopte une approche prudente en matière de hausse des taux, ce qui constitue un frein pour la devise.
L’inflation sous-jacente en année glissante s'est établi à 6,5% pour le mois d’avril, soit plus haut qu’attendu. Le 4 mai, la Banque de Norvège a relevé ses taux d'intérêt de 25 pb à 3,25%. Selon le gouverneur Ida Wolden Bache, les taux pourraient continuer d’augmenter. Une nouvelle hausse des taux est donc probable en juin.
Le différentiel de taux a favorisé l'euro jusqu'à fin avril, mais s’est inversé depuis début mai. La hausse attendue des prix du pétrole et les facteurs techniques continuent d'indiquer une appréciation de la couronne norvégienne.
Nous augmentons notre objectif à 3 mois de 10,6 à 11,3 et notre objectif à 12 mois de 10,3 à 10,8 suggérant un renforcement de la NOK.
VUE AUD >> CIBLE 12M VS USD : 0,73
Potentiel d’appréciation modéré
Le dollar australien (AUD) a connu une volatilité accrue au cours des dernières semaines, effaçant ainsi quelque peu la performance face au dollar américain.
Le 2 mai, la Banque Centrale a surpris les marchés en relevant son taux directeur de 25 pb supplémentaires à 3,85% suivi d'un discours indiquant que l'inflation reste relativement élevée et que le taux de chômage est au plus bas depuis plus de 50 ans.
Cette hausse des taux permet d'éviter des risques haussiers sur l'inflation des services. Cette dernière est restée cependant élevée pour le mois d'avril (en année glissante). Au 5 mai, les marchés tablaient sur une probabilité de 94% de hausse des taux lors de la prochaine réunion du 6th juin.
Cependant, la réouverture de la Chine et la hausse de la demande pour les matières premières industrielles, en particulier celles nécessaires pour les batteries et l'électronique, devraient améliorer les termes de l'échange pour l’Australie et, à terme, favoriser l'AUD.
Nous maintenons notre objectif à 3 et 12 mois à 0,70 (valeur d'un dollar australien) et 0,73 respectivement, ce qui suggère une appréciation du dollar australien.
VUE NZD >> CIBLE 12M VS USD : 0,65
Rebond attendu
Le dollar néo-zélandais s'est apprécié face au dollar américain début mai après une performance décevante en avril. La banque centrale a de nouveau augmenté son taux directeur de 50 pb maintenant à 5,25%. Une pause dans les prochaines hausses de taux soulagerait quelque peu les ménages, mais l'inflation doit encore baisser avant de pouvoir mettre fin au cycle de hausse des taux. L'inflation est retombée à 6,7% en glissement annuel au premier trimestre 2023.
Sur le plan domestique, l'accent est mis sur le marché du travail qui reste sous pression, comme en témoigne la baisse du taux de chômage (3,4%), plus faible que prévu. Un taux de chômage plus élevé devrait contenir la hausse des salaires et être un signe de soulagement pour la banque centrale.
La récente réouverture en Chine n'est pas encore reflétée dans la balance commerciale de la Nouvelle-Zélande, qui a perdu 16,40 Mrd (NZD) en mars.
Le prix du lait a augmenté de 8% en avril, atteignant un prix de vente moyen de 3 506 USD la tonne, ce qui pourrait soutenir le NZD dans la mesure où le lait représente environ 20% des exportations néo-zélandaises.
Nous maintenons nos objectifs à 0,65 pour les 3 et 12 mois (un dollar néo-zélandais). Cela suggère une appréciation modérée du dollar néo-zélandais par rapport à ses niveaux actuels.
VUE CAD >> CIBLE 12M VS USD : 1,30
Potentiel d’appéciation modéré
Le dollar canadien (CAD) a oscillé autour de 1,34 (valeur d'un dollar) ces dernières semaines. Compte tenu de la baisse des taux aux États-Unis et du maintien d'un ton prudent par la Banque du Canada, nous pensons que le dollar canadien pourrait s'apprécier.
Le 12 avril, la Banque du Canada a maintenu son taux d'intérêt à 4,5% en attendant que sa politique restrictive se répercute pleinement sur l'économie. L'inflation en année glissante semble maîtrisée à 4,3% en mars en deçà des prévisions. La balance commerciale du mois de mars est ressortie supérieure aux attentes avec un excédent de 0,97 Mrd de dollars canadiens (CAD). Le taux de chômage est toutefois ressorti inférieur aux prévisions à 5% pour le mois d'avril.
Le dollar canadien a été quelque peu influencé par l'évolution des cours du pétrole au cours des dernières semaines. Ce dernier devrait augmenter progressivement, ce qui pourrait donner un potentiel d'appréciation supplémentaire au dollar canadien. Le niveau élevé du ratio dette/PIB des ménages (103% au T4 2022) pourrait toutefois peser sur la performance.
Nous maintenons notre objectif à 1,32 sur 3 mois et notre objectif à 1,30 sur 12 mois (valeur d’un dollar), ce qui suggère un potentiel d'appréciation modéré par rapport aux niveaux actuels.
VUE CNY >> CIBLE 12M VS USD : 6,50
Une vigueur accrue à l’horizon
Le CNY (valeur d’un dollar) a été relativement stable ces dernières semaines. Il oscillait autour de 6,90.
Le programme de prêts à moyen terme est resté inchangé à 3,65%. La banque centrale n'a annoncé aucun changement dans son taux directeur pour le huitième mois consécutif, en partie en raison d'une forte reprise économique après le retrait de la plupart des mesures anti-Covid en décembre.
L'économie chinoise a progressé de 4,5% en année glissante et les exportations du mois de mars ont fortement augmenté à 14,8%. En revanche, les importations sont restées négatives par rapport a l’année dernière.
En glissement annuel, les ventes au détail ont progressé de 10,6%, plus haut que prévu, et l'inflation de 0,7%, en revanche plus bas que prévu en mars. L'indice PMI manufacturier est ressorti inférieur aux attentes à 49,5 et celui des services à 56,4 pour le mois d'avril.
L'amélioration de la balance commerciale et des perspectives économiques de la Chine a favorisé le sentiment à l'égard des actions et des obligations à haut rendement. En fin de compte, il devrait y avoir davantage d'entrées de capitaux et cela devrait entraîner une appréciation du CNY.
Nous maintenons nos objectifs à 3 et 12 mois à respectivement 6,75 et 6,50 (valeur d’un dollar). Cela suggère une appréciation du CNY par rapport à ses niveaux actuels.