Focus Stratégie d'Investissement : Novembre 2021
Résumé
- Une très bonne période pour les bénéfices, la saisonnalité est favorable aux actions : les excellents résultats publiés par les entreprises américaines au T3 ont poussé les actions à atteindre de nouveaux pics historiques, dopées par les bénéfices des valeurs bancaires progressant, en moyenne, de 20 %. Le T4 est traditionnellement une période positive pour les résultats, alors que les rendements réels restent négatifs. Les indicateurs de tendance suggèrent un positionnement toujours positif à l'égard des actions.
- Le pire est-il passé pour les États-Unis et le Royaume-Uni ? Les indicateurs de surprises économiques qui mesurent le niveau de surperformance des données macroéconomiques publiées par rapport aux anticipations des prévisionnistes sont revenus à des niveaux proches de zéro pour les deux pays, soulignant l’amélioration de l'environnement macroéconomique par rapport aux bas niveaux atteints en septembre. Le gouvernement britannique prévoit un taux de croissance solide de 6 % pour 2022. Nous continuons de penser que les actions et les obligations britanniques sont attractives à long terme.
- Les banques centrales présentent le plus grand risque : la Banque du Canada a annoncé une hausse probable des taux pour avril 2022 et les marchés anticipent donc un risque plus élevé d'erreur de politique de la part des banques centrales telles que la Réserve Fédérale américaine. Les marchés semblent surévaluer les hausses de taux aux États-Unis et au Royaume-Uni, mais nous considérons que les hausses de taux trop rapides représentent le principal danger pour les marchés financiers à l’heure actuelle.
- Les investiseurs n’aiment pas les bons du Trésor américains : le consensus à l'égard des obligations souveraines américaines et européennes est presque universel, et pourtant, les obligations à long terme résistent bien. Nous soulignons la baisse de 25 points de base des taux réels américains à 10 ans depuis fin septembre, ce qui est favorable aux actifs réels et aux actions.
- Prise de bénéfices sur les actions indiennes : nous avons revu à la baisse, de positive à neutre, notre positionnement à l'égard des actions indiennes, après leur surperformance impressionnante par rapport aux actions des marchés émergents depuis le mois de février.
Vue d’ensemble
Les perturbations de la chaîne d'approvisionnement devraient s’atténuer, révision à la hausse des prévisions économiques du Royaume-Uni
L'impact sur l'économie des perturbations de la chaîne d'approvisionnement a atteint son point culminant : il semble que ces perturbations, dues au manque de composants essentiels, associées aux embouteillages dans les ports de la côte ouest américaine ont, atteint un point culminant à l’heure actuelle.
Les sociétés américaines et européennes s'attendent à ce que les difficultés de la chaîne d'approvisionnement s’atténuent au cours du T4 et en 2022, alors que la flambée des prix de l'énergie retombe en Europe, ce qui devrait alléger le frein sur la croissance européenne. L'indicateur économique avancé hebdomadaire de l'ECRI pour les États-Unis s'est repris en octobre, suggérant que le point culminant de l’impact négatif à court terme sur l'économie américaine est passé. Plus important encore, les indices de nouvelles commandes restent très élevés, ce qui signifie qu’aucun ralentissement de la demande n’est en vue.
Accélération des investissements des gouvernements et des entreprises : il est évident, si l'on compare les investissements dans les biens d'équipement américains à ceux d'il y a 2 ans (ce qui nous permet ainsi d’éviter les perturbations dues au confinement), que les investissements des entreprises s'accélèrent au fur et à mesure que celles-ci réagissent aux perturbations de la chaîne d'approvisionnement.
Le principal risque - la réaction excessive à court terme des banques centrales à l'inflation : la Banque du Canada a annoncé une hausse probable des taux pour avril 2022 et les marchés anticipent donc un risque plus élevé d'erreur de politique de la part des banques centrales telles que la Réserve Fédérale américaine ou la Banque d’Angleterre.
Le risque de voir l'inflation se maintenir à un niveau élevé pendant encore quelque temps est manifeste, en particulier aux États-Unis où même la Réserve Fédérale de Cleveland a relevé un indice moyen des prix à la consommation tronqué à 3,5 %. L’inflation pourrait toutefois, avec l’amélioration annoncée des perturbations de la chaîne d'approvisionnement et la baisse des prix de l'énergie, s'atténuer d'ici le début de l'année 2022.
Nous pensons que les marchés surévaluent le risque de hausse des taux aux États-Unis et au Royaume-Uni, avec quasiment trois hausses de 25 points de base intégrées dans les contrats à terme sur les fonds fédéraux américains d’ici le début de 2023. Nous prévoyons, à l'inverse, que la Fed relèvera ses taux de 25 points de base pour la première fois à la fin 2022, ce qui représente un rythme beaucoup moins agressif.
Nous considérons que les hausses de taux trop rapides par les banques centrales représentent le principal danger pour les marchés financiers à l’heure actuelle.
CONCLUSION
La dynamique macroéconomique s'est essoufflée au cours des deux derniers mois suite à l’impact des perturbations de la chaîne d'approvisionnement et de la hausse des prix de l'énergie. Toutefois, la demande finale résiste bien, tant au niveau de la consommation des ménages que des investissements des sociétés. Cela conforte nos solides prévisions de croissance pour 2022. Le principal risque pour notre scénario central de croissance nominale robuste est un resserrement trop agressif des banques centrales.
Thème du mois
Résurgence des bulles sélectives
Une euphorie récurrente: Certains des investissements les plus populaires de 2020 ont encore atteint de nouveaux sommets, soulignant l'euphorie des investisseurs dans certaines poches des marchés financiers. La crypto-monnaie et les méga-capitalisations technologiques américaines sont deux exemples clairs de cette euphorie récurrente.
Depuis mai 2021, Tesla (dans l'indice NYSE FANG +) a quasiment doublé, tandis que le « jeton mème » Shiba Inu (SHIB) a progressé de plus de 1 000 % depuis fin septembre. Les « jetons mèmes » désignent les jetons initialement créés pour être une blague.
L'argent bon marché en est le moteur : le moteur sous-jacent de cette euphorie reste le coût très bas de l'argent, associé à l’augmentation des allocations de chômage (qui ont désormais pris fin) et à l'émission de monnaie hélicoptère sous la forme de chèques envoyés directement aux ménages américains éligibles.
Ces deux exemples relancent le spectre de bulles d'investissement euphoriques, un signe, selon nous, que les investisseurs devraient faire preuve d’une certaine prudence à l'égard des actifs à risque.
Mais les récents « mèmes » d’investissement ne fonctionnent pas tous : cette euphorie semble très sélective. L'indice Renaissance IPO a fait du surplace en 2021.
La reprise de d’autres thèmatiques qui ont connu une euphorie comme les valeurs les plus mentionées sur les réseaux sociaux ou encore les récoltes alternatives et l'hydrogène n’a pas été aussi vigoureuse : en effet , les indices du « sentiment social » (un tracker ou FNB qui achète des valeurs souvent mentionnées sur les réseaux sociaux), des récoltes alternatives (actions de cannabis) ou encore de l'hydrogène ont fortement progressé au début de l’année 2021.
Ces trois types d’indices sont à présent loin des sommets atteints en février 2021. Il en va de même pour les cours des trackers ou FNB qui suivent les valeurs d’hyper croissance tels que le cours du « ARK Innovation » et de « Direxion Moonshot Innovators ».
CONCLUSION
La réflation sélective de bulles d'investissement potentielles dans les actions du FANG+ et les crypto-monnaies signifie que nous n’assistons pas à un excès d’optimisme euphorique généralisé sur les marchés financiers. Beaucoup d’autres anciens « mèmes » d'investissement de la fin 2020 ne se sont pas repris et, dans l'ensemble, le sentiment global des investisseurs particuliers reste bien loin des niveaux observés en 2000.
Perspectives sur les marchés des actions et des matières premières
La tendance reste votre alliée
Les marchés actions ont progressé en octobre : la hausse de 3 % enregistrée par les États-Unis le mois dernier et les gains modestes de l'Europe, associés à la reprise inattendue de 6 % de l'indice Hang Seng de Hong Kong correspondent à la saisonnalité généralement haussière du T4.
La forte dynamique des bénéfices, grâce aux résultats en hausse du T3, associée à l’augmentation des rachats d'actions, aux rendements réels négatifs et à la reprise des activités de fusions-acquisitions sont autant de moteurs clés pour les actions. Le niveau élevé d’épargne liquide toujours en attente met en évidence la puissance de feu potentielle qui pourrait encore affluer sur les marchés boursiers au T4 2021. Le principal risque reste une éventuelle modification des conditions de liquidité macroéconomique en cas de resserrement de la politique monétaire mondiale.
La COP26, un catalyseur pour les énergies renouvelables : les conférences mondiales sur le climat COP24 et COP25 ont agi comme un catalyseur positif pour les valeurs d’énergie propre en 2018 et 2019. La COP26 devrait également recentrer l’attention sur les valeurs d’énergie propre, après un ralentissement de l'enthousiasme pour les énergies renouvelables depuis le mois de février.
Prise de bénéfices sur les actions indiennes
Nous avons décidé de prendre des bénéfices sur les valeurs indiennes en raison, notamment, de la très forte hausse des cours, passant de Positive à Neutre. Le Sensex s'est apprécié de 52 % au cours des 12 derniers mois, le marché actions le plus performant au monde en 2021. Il se négocie à une prime record de 60 % par rapport aux actions asiatiques. L'indice Sensex 30 se négocie à 26 fois les bénéfices de l'année en cours et à 22 fois les bénéfices de l'année prochaine. De plus, la hausse des prix de l'énergie et de l'inflation conduira la Banque Fédérale d’Inde à relever ses taux, comme dans le reste du monde.
Les fondamentaux à long terme de l'Inde restent solides : i) l'amélioration du paysage économique sous la houlette du Premier ministre Modi ; ii) une population jeune - la démographie est un moteur clé de la croissance dans un monde vieillissant ; iii) des niveaux d'endettement inférieurs à ceux des autres principaux pays ; iv) un marché intérieur vaste et en pleine croissance, et v) une forte culture de rentabilité élevée des capitaux propres et de performance des entreprises. Nous réexaminerons la situation en cas de repli du marché. L'Inde offre également un potentiel de diversification par rapport à la Chine avec une corrélation plus faible.
CONCLUSION
Les petites capitalisations continuent de surperformer en Europe depuis le début de l'année (+23 %), soutenues par de meilleures perspectives bénéficiaires et par la poursuite de la reprise cyclique. L'indice MSCI EM Small Cap (moyennes capitalisations en réalité) bénéficie de son biais sur Taïwan et la Corée du Sud. Nous avons abaissé la note des actions indiennes de positive à neutre après leur surperformance impressionnante.
Perspectives sur les obligations, le crédit et le marché des changes
Le consensus parie fortement contre les bons du Trésor américains
Hausse du rendement du Bon du trésor américain à 2 ans suite aux prévisions de relèvement des taux par la Fed : la Banque du Canada ayant signalé une hausse probable des taux pour avril 2022, les marchés anticipent un risque plus élevé d'erreur de politique de la part des banques centrales.
Les contrats à terme sur les fonds fédéraux américains intègrent désormais quasiment trois hausses de taux par la Réserve Fédérale d’ici la fin de l’année 2022 : le taux implicite des fonds fédéraux établi par le marché à terme des fonds fédéraux s'établit désormais à 0,7 % d’ici la fin de 2022, ce qui est bien supérieur à notre prévision d’augmentation unique de seulement 25 points de base au cours du T4 2022. Cela se traduit par un rendement du Bon du trésor américain à 2 ans désormais supérieur à 0,5 %, en hausse de près de 40 points de base depuis la mi-juin.
Le marché obligataire est clairement préoccupé par un point mort d'inflation à 10 ans de près de 2,7 % et un taux d’inflation de base de l’IPC d’environ 4 %. Ceux-ci pourraient inciter la Fed à abandonner son discours sur « l'inflation transitoire » et réduire ses achats obligataires tout en augmentant les taux plus rapidement que prévu.
La reprise du crédit se poursuit, comme en témoigne le resserrement des spreads : Les indices de spreads de crédit des obligations notées BBB de Barclays aux États-Unis et en Europe restent proches de leurs plus bas niveaux historiques à 1 %, ce qui reflète l'amélioration des fondamentaux des sociétés emprunteuses.
Les étoiles montantes dépassent les anges déchus: : d'après S&P Global Market Intelligence, depuis le début de l'année, le nombre d’étoiles montantes (les sociétés dont la notation de crédit est passée de non-IG à IG) dépasse de sept à deux le nombre d'anges déchus. Le variant Delta de la COVID-19 étant en recul aux États-Unis et dans la plupart des pays européens, l'amélioration des bilans et des flux de trésorerie des entreprises devrait se poursuivre au cours des mois à venir.
L’un des facteurs qui devrait toutefois favoriser les détenteurs d'actions par rapport aux détenteurs d'obligations d'entreprises à l’avenir est l’attention accrue accordée par les entreprises à la rémunération de leurs actionnaires par l’intermédiaire des dividendes et des rachats d'actions, ainsi que l’intensification des activités de fusions-acquisitions, les sociétés poursuivant leur recherche de croissance.
CONCLUSION
Même si l'essentiel de la sous-performance des obligations souveraines des marchés développés est peut-être derrière nous, nous estimons qu’il est encore trop tôt pour modifier notre positionnement négatif à l'égard de la classe d'actifs. Les obligations souveraines à court terme sont désormais beaucoup plus attrayantes suite à la récente hausse des rendements, mais nous attendons les derniers chiffres de l'inflation et de l'emploi avant de réévaluer notre positionnement sur ce segment de l'univers des obligations souveraines.