#Articles — 06.02.2020

Pétrole : de neutre à positif

Xavier TIMMERMANS, Senior Investment Strategy, PRB, Belgique

Les prix du baril de brut ont perdu 20% depuis leurs plus haut du mois de janvier alors que les tensions entre Etats-Unis et Iran faisaient craindre le pire...

Investment theme 7 | BNP PARIBAS WEALTH MANAGEMENT

L’épidémie de Coronavirus devrait réduire la demande mondiale du fait des limitations de déplacements et du ralentissement de l’activité. Notre conviction est que cette faiblesse des prix devrait être assez brève. Les problèmes de rentabilité de l’industrie du pétrole de schiste et la situation budgétaire des pays de l’OPEP devraient conduire assez rapidement à une réduction de l’offre.

Les mesures de quarantaine, les limitations des déplacements et les fermetures d’entreprises en Chine pourraient réduire la demande mondiale de près de 400 000 barils par jour (sur une consommation totale proche de 100 millions de barils par jours). Cela peut paraître peu en pourcentage mais dans une situation de surplus d’offre par rapport à la demande, l’impact sur les prix est énorme.

L’industrie du pétrole de schiste est sensible aux prix

Notre analyse est que le niveau de 50$ par baril de West Texas Intermediate (WTI) est intenable pour l’industrie du pétrole de schiste. Cette industrie qui est encore dominée par des petits producteurs indépendants était déjà dans une situation difficile avant la baisse des cours du brut. Contrairement aux champs pétroliers classiques, la durée de vie des puits de pétrole de schiste est relativement courte ce qui exige des investissements continus pour forer de nouveaux puits. Or ces petits producteurs éprouvaient déjà des difficultés pour générer des cashflows de façon consistante et pour se financer. Le nombre de faillites a doublé en 2019 (42 aux USA et au Canada) et le total des obligations US en défaut dépasse 208 milliards de dollars. Les actionnaires exigent désormais plus de dividendes et moins d’investissements. 

Chaque recul majeur des prix du brut s’est traduit par une diminution des puits en activité après une période d’adaptation de 3 à 4 mois. Il en sera de même cette fois-ci, ce qui réduira l’excès de production.

L’OPEP+ envisage de réduire encore sa production

Les pays de l’OPEP et associés (« OPEP+ ») ont décidé début décembre d’augmenter leurs restrictions de production de 0,5 million de barils par jour supplémentaire et l’Arabie Saoudite a encore réduit son propre quota de 0,4 mb/j, portant le total des restrictions de production à 2,1 mb/j. Depuis trois ans, le groupe a globalement respecté ses engagements malgré les doutes quant au respect de la discipline en son sein.

L’OPEP+ discute en ce moment de mesures additionnelles d’urgence pour faire face à la dégringolade des prix. Cette éventualité peu mettre un frein à la spéculation à la baisse, l’OPEP+ se comportant comme les banques centrales dont les discours influencent les marchés avant même toute prise de décision.

L’absence de prime de risque géopolitique est anormale

Les risques géopolitiques qui n’ont pas disparus au Moyen Orient. L’attaque redoutablement efficace de septembre 2019 sur les installations pétrolières saoudiennes et les vives tensions USA-Iran de début janvier doivent nous rappeler que l’absence de prime de risque dans les prix du brut est une anomalie. Au moindre incident, les prix du brut peuvent s’envoler

Les perspectives à moyen terme restent positives

Les perspectives à 2-3 ans restent positives du fait du manque d’investissement dans les champs pétrolifères classiques dans les années qui ont suivi la chute des prix de 2014. Sans investissement, la production des champs classiques diminue de 6 à 7% par an en moyenne.

Les effets de la transition énergétique ne devraient se faire sentir que beaucoup plus tard.

Conclusion

Nous pensons que la diminution de la consommation liée à la crise sanitaire du corona virus est de nature temporaire. La demande n’a pas disparu, elle est juste reportée. Les prix du baril de Brent devraient remonter de ± 55$/b actuellement à 60-70$/b dans les prochains mois.  Les problèmes de rentabilité de l’industrie du pétrole de schiste et la situation budgétaire des pays de l’OPEP+ exigent un prix d’équilibre plus élevé. Il en va de l’intérêt de tous les producteurs de réduire temporairement leur production.