#Articles — 14.01.2020

Prévisions économiques 2020

Guy Ertz

Investment theme 7 | BNP PARIBAS WEALTH MANAGEMENT

EN BREF : La contraction de l'activité manufacturière dans les principales économies exportatrices ainsi que l'incertitude sur le commerce international ont créé des craintes de récession, mais actuellement, il existe de timides signes de stabilisation, que nous considérons comme une tendance sous-jacente à l'amélioration. Compte tenu de l'accord commercial récemment conclu entre les États-Unis et la Chine et du soutien continu des principales banques centrales, la croissance mondiale devrait se redresser modestement après le premier trimestre 2020. Toutefois, le rythme de la reprise devrait être faible par rapport aux normes passées. Les forces structurelles à long terme (par exemple la démondialisation et les tendances démographiques défavorables) réduisent le taux d'intérêt d’équilibre et par conséquent, rendent les mesures de relance monétaire plus difficiles pour les banques centrales, en particulier dans les économies avancées. Ces forces limitent également la hausse des rendements obligataires.

Etats-Unis : Léger ralentissement avant la reprise de la croissance

Notre scénario de base pour la croissance économique américaine est un atterrissage en douceur au premier semestre 2020. Malgré la vigueur actuelle de l'économie, nous pensons que la faiblesse de l'investissement des entreprises et de l'activité manufacturière limitera les effets positifs d'une consommation privée robuste et du marché du travail tendu. Malgré l'accord commercial « phase 1 » avec la Chine, les investissements des entreprises et l'activité manufacturière pourraient rester modérés en 2020 en raison d'une croissance économique atone en dehors des États-Unis et de l'incertitude liée à l'issue des prochaines élections et à la possibilité de changements de politique. Grâce à l'assouplissement des conditions financières, à l'amélioration de la productivité à long terme et aux investissements des entreprises, nous prévoyons une reprise de la croissance économique aux États-Unis au second semestre 2020 et en 2021. Nos prévisions de croissance sont de 1,5 % pour 2020 et de 2,0 % pour 2021. L'inflation devrait également se renforcer à court terme en raison d'effets de base, de l'inflation des salaires répercutée sur les prix à la consommation et de la hausse structurelle des coûts de santé et du logement. En ce qui concerne l'accord commercial « phase 1 » entre les États-Unis et la Chine, qui est largement attendu, nous pensons qu'il constitue une étape importante vers l’apaisement des tensions. Même si l'impact direct de l'accord commercial sur l'économie américaine devrait être marginal, son effet sur le sentiment de marché pourrait avoir des répercussions indirectes relançant une demande jusqu’alors en berne et en particulier les investissements d’entreprise. Il convient de noter que les prochains cycles de négociations incluront des questions litigieuses d'importance stratégique et qu'il sera beaucoup plus difficile de parvenir à un accord plus global. La Réserve fédérale a laissé son taux directeur inchangé en décembre après avoir conclu un cycle de trois baisses de taux consécutives de 25 pb, invoquant les risques posés par le ralentissement mondial. Les membres du FOMC considèrent la politique actuelle comme appropriée et la maintiendront jusqu'en 2020, sauf en cas de changement inattendu des perspectives. Alors que la croissance et les inquiétudes géopolitiques reculent, nous ne prévoyons plus que la Fed réduise ses taux en 2020. Nous supposons que les taux directeurs resteront au niveau actuel tout au long de l'année.

Zone euro : Des risques plus équilibrés

La croissance économique reste fragile dans la zone euro mais une récession ne semble pas probable à court terme. Malgré des signes encourageants de stabilisation, nous anticipons des faiblesses persistantes au cours des prochains trimestres, le choc commercial ne s’étant pas encore totalement répercuté sur l'ensemble de l'économie. En revanche, la politique monétaire accommodante et l'amélioration du sentiment mondial vont probablement conduire à une hausse des investissements et à un environnement plus favorable aux exportateurs de la zone euro. En outre, les projets de budgets nationaux pour l'année prochaine indiquent que la politique budgétaire des principales économies de la zone euro sera modestement favorable. Selon nous, la croissance économique de la zone euro se redressera timidement au second semestre 2020 et continuera à progresser en 2021. Nos prévisions de croissance économique en zone euro sont de 0,8 % pour 2020 et de 1,3 % pour 2021. Les risques pesant sur les perspectives sont assez équilibrés. Une détérioration des relations commerciales entre les États-Unis et l'Europe (incluant éventuellement des tarifs sur les voitures) est un risque baissier majeur. Selon nous, la croissance sous-jacente de l'Indice des Prix à la Consommation devrait légèrement augmenter début 2020. Des facteurs structurels tels que le vieillissement de la population, la mondialisation et l'automatisation, ainsi qu'un écart de production croissant, maintiendront l’inflation (mesurée par l'IPCH) autour de 1% en 2020 et en 2021. Nous prévoyons que la BCE maintiendra son orientation hyper-accommodante sur notre horizon de prévision de 2020-21. Selon nous, les chances de nouvelles mesures d'assouplissement sont relativement faibles. Les limites de l’assouplissement quantitatif et les effets indirects des taux négatifs sont de plus en plus décriés par les membres du Conseil des gouverneurs.

Royaume-Uni : Les perspectives post-Brexit s'améliorent

La victoire écrasante des conservateurs aux élections nationales donne à Boris Johnson un mandat clair pour mettre en œuvre son programme et ouvre la voie à une sortie du Royaume-Uni de l'UE d'ici fin janvier 2020. L'optimisme issu de la résolution finale du Brexit va probablement bientôt céder la place aux inquiétudes sur la période de transition, surtout après l'engagement de Boris Johnson à inclure dans la loi l'interdiction d'une prolongation de la période de transition. Après la signature de l'accord de divorce entre l'UE et le Royaume-Uni, une nouvelle phase de négociations difficiles sur les relations entre l'UE et le Royaume-Uni après le Brexit débutera. L'incertitude pourrait ainsi rester élevée dans les prochains mois. Dans le même temps, les résultats des élections confirment notre conviction d'une politique budgétaire de soutien cette année, les mesures devraient doper la croissance du PIB de 0,8 % en 2020. Les conservateurs sont favorables à une modeste expansion budgétaire mais celle-ci s'ajoutera aux importantes mesures de dépenses annoncées en septembre. Dans le même temps, Boris Johnson a dévoilé certains plans d'investissement pour de nouvelles infrastructures. Nous anticipons un léger ralentissement de la croissance en 2020 et une réaccélération de la croissance en 2021. Nos prévisions de croissance du PIB sont de 1,1 % en 2020 et de 1,7 % en 2021. Dans l'ensemble, nous prévoyons que le taux directeur restera inchangé au cours de notre période de prévision 2020-21, compte tenu du manque de pression sur les prix et de clarté au cours de la deuxième phase des négociations sur le Brexit.  

Japon : Signes de stabilisation

En 2020, l'économie japonaise devrait éviter une récession car un nouveau ralentissement des exportations et de la production est peu probable. Malgré la faiblesse de l'industrie automobile japonaise, des signes de reprise modeste des exportations de biens technologiques et de stabilisation des exportations de biens d'équipement apparaissent. L'accord « phase 1 » entre les États-Unis et la Chine va permettre de relancer une demande en berne et devrait doper les exportations japonaises. Face à la faiblesse de la croissance économique, le gouvernement japonais a annoncé un plan budgétaire pluriannuel équivalent à 13 trillons de yen ou 1,9 % du PIB, destiné à la modernisation des infrastructures, à la réparation des dommages causés par un récent typhon et aux investissements dans les nouvelles technologies. Il convient de mentionner que 8-9 milliards de yens (1,4 % du PIB) seront attribués aux dépenses budgétaires, 3-4 milliards de yens étant utilisés pour les infrastructures publiques. Nos prévisions de croissance du PIB sont de 0,2 % en 2020 et de 0,7 % en 2021. Selon nous, la dissipation des risques baissiers et la politique budgétaire favorable du gouvernement permettront à la BoJ de maintenir ses taux inchangés sur notre horizon de prévision.

Marchés émergents : Reprise cyclique à venir

La croissance économique globale des marchés émergents devrait être faible au premier trimestre 2020, puis s'accélérer au cours de l'année, grâce à l'assouplissement substantiel de la politique monétaire qui a déjà eu lieu dans la plupart des pays émergents. Cette reprise cyclique dans les marchés émergents est conforme à notre scénario de base d’une reprise de la croissance mondiale au second semestre 2020 et en 2021. L'inflation dans la plupart des marchés émergents devrait rester maîtrisée et relativement proche du niveau souhaité des banques centrales. Malgré les fluctuations à court terme de l'inflation globale, l'inflation sous-jacente semble s'orienter structurellement à la baisse en raison de divers facteurs structurels tels que la technologie et la mondialisation. La faiblesse de l'inflation et la marge de manœuvre suffisante pour réduire les taux impliquent un assouplissement monétaire supplémentaire dans certains pays émergents. Toutefois, nous pensons que l'essentiel des baisses de taux a déjà eu lieu. Après une année de chocs structurels, cycliques, monétaires et externes, la croissance en Chine devrait ralentir en 2020 sous la forte pression du secteur immobilier où les indicateurs avancés laissent entrevoir une détérioration. Sur le front commercial, l'accord « phase 1 » récemment conclu avec les États-Unis semble mettre fin à la tendance haussière des tarifs, au moins temporairement. Malgré les avancées sur le plan commercial, l'économie chinoise reste dans une phase de transition et fait face à de multiples vents contraires. Par conséquent, nous prévoyons une décélération de la croissance en Chine de 6,1 % en 2019 à 5,7 % en 2020 et une reprise marginale en 2021 à 5,8 %. En ce qui concerne les prix à la consommation en Chine, nous prévoyons que la flambée des prix du porc entraînera un pic d'inflation globale de près de 5 % (en glissement annuel) au premier trimestre, mais par la suite, l'effet s'atténuera. Les autorités monétaires et budgétaires devraient mettre en œuvre des politiques contracycliques contre les risques de ralentissement, mais nous n'anticipons pas de mesures agressives.