#Articles — 09.06.2020

Trop vite, trop fort… ou pas ?

Xavier TIMMERMANS, Senior Investment Strategist PRB

Encouragées par de bonnes surprises sur les plans sanitaire, monétaire, budgétaire et même économique, les bourses ont terminé la semaine sur une note forte.

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Sur la semaine, le Stoxx Europe 600 a progressé de 7,1% et le S&P 500 de 4,9%. La plus grosse surprise est venue du marché de l’emploi aux États-Unis. Le dollar s’est affaibli et les rendements des obligations du trésor US se sont redressés.

 

Bonnes nouvelles sur le plan sanitaire, monétaire et budgétaire

Sur le plan sanitaire, la grande crainte d’une seconde vague de contamination ne se matérialise pas. En Europe, on n’observe pas de résurgence du nombre de contaminations dans les pays qui sortent du confinement. Et au niveau mondial, le nombre de victimes continue de diminuer.  

Sur le plan monétaire, la BCE a surpris les marchés en augmentant son programme de rachat d’obligation PEPP (Pandemic Emergency Purchase Program) plus que prévu : +600 milliards d’euros portant le total à 1350 milliards. Ce programme est prolongé jusqu’en juin 2021. La Fed a aussi innové en incorporant désormais à ses rachats des obligations des états et de certaines grandes villes américaines.

Sur le plan budgétaire, la très vertueuse Allemagne a décidé d’un nouvel effort de 130 milliards d’euros (4% du PIB) qui s’ajoute aux 353 milliards de l’aide d’urgence et aux 852 milliards de garantie de prêts. Sur le plan européen, le Recovery Fund de 750 milliards est encore en discussion. Au Japon, c’est 1100 milliards de dollars qui viennent s’ajouter.

  

Un rapport de l’emploi US historique

La plus grosse surprise de la semaine est venue vendredi avec la création de 2.509.000 emplois aux États-Unis alors que les économistes s’attendaient à une perte de 7.500.000 emplois.  Le taux de chômage a diminué de 14,7% à 13,3% contre 19% attendu.

Cette reprise de l’emploi liée au déconfinement n’est malheureusement pas uniforme dans la population américaine. Le taux de chômage des Afro-Américains a grimpé à 16,8%, au plus haut depuis 1984.

 

Les marchés semblent vouloir ignorer les risques

Les risques sont nombreux et n’ont pas diminués : 1/ une résurgence de l’épidémie, 2/ un redémarrage trop faible ou trop lent de l’économie, 3/ des mouvements sociaux persistants, 4/ une escalade des tensions USA-Chine, 5/ de nouvelles tensions autour du Brexit.

On peut arguer que les trois premiers ne devraient peut-être pas se matérialiser immédiatement. Une nouvelle vague de contamination n’est-elle pas plus probable en automne/hiver qu’en plein été ? Ce n’est pas maintenant mais dans quelques mois que l’on pourra jauger l’ampleur des dégâts durables sur l’économie. Les tensions sociales ne sont-elles pas plus probables à la rentrée que pendant les vacances ?

Le risque d’escalade des tensions entre USA et Chine est plus difficile à appréhender, le président Trump étant totalement imprévisible. Sa rhétorique antichinoise plaît aux électeurs américains. Restera-t-il sur le plan de la rhétorique sans actions concrètes dommageables pour les bourses ? Tout au plus peut-on espérer que le président ne prenne pas ce risque car il a l’habitude de mettre en avant les performances boursières pour démontrer que sa politique économique est bonne…  

Quant au Brexit, l’incertitude demeure. La décote du marché anglais reste énorme.

 

Beaucoup de bonnes nouvelles sont dans les cours, une opportunité de vendre ?

Pour les investisseurs qui ont acheté en mars, prendre un peu de bénéfice à ce stade n’est pas malsain, bien au contraire.

Mais pour un investisseur qui n’est pas surinvesti en actions - qui est « neutre » par rapport à son profil de risque - réduire le poids des actions maintenant n’est pas si évident. Nous restons positifs sur une reprise économique progressive grâce aux injections colossales de liquidités par les banques centrales et aux énormes efforts de soutien budgétaires. Cela devrait soutenir les bourses. A vouloir (trop) faire du market timing, on prend le risque de rater la tendance principale.

A court terme, le flux de nouvelles économiques devrait rester positif du fait de la comparaison avec le creux que l’on vient de subir.

 

Quelques signes plaident pour une continuation ou un élargissement de la hausse

Le dollar, valeur refuge pendant la crise sanitaire, est en train de faiblir contre l’euro mais aussi contre les devises des pays émergents. C’est peut-être un signe que les investisseurs commencent à tabler sur une reprise de l’économie mondiale et osent investir hors des États-Unis.

Depuis mi-mai, les cycliques et les titres « value » surperforment…  Si cela se confirme, ce serait une bonne nouvelle car la hausse jusqu’à présent a été portée par un petit nombre de géants de la technologie et par les pharmaceutiques. En outre, l’accentuation de la pente de la courbe des taux, si elle se confirme, devrait être favorable aux valeurs financières.

 

Conclusion

Après une hausse de 43% pour le S&P 500, 40% pour le Bel20 et de 34% pour le Stoxx Europe 600, une pause ou une correction serait normale. Mais est-on dans une période normale quand les banques centrales injectent plus de 6000 milliards de dollars dans le système ?

La volatilité ne devrait pas disparaître. Il y aura donc des corrections. Cependant notre stratégie ne change pas : profiter des reculs pour compléter les positions.

L’après-coronavirus sera caractérisé par des dettes publiques élevées. Pour gérer cela, banques centrales et gouvernements voudront maintenir les taux bas le plus longtemps possible même si l’inflation repart quelque peu. Face à des taux réels négatifs, les actifs réels seront les seuls à maintenir le pouvoir d’achat de l’épargne à long terme : actions, immobilier et or.