Perspectives mensuelles sur les marchés obligataires - Juin

Résumé
- La Fed et la BCE veulent resserrer leurs taux directeurs pour combattre l’inflation. La BCE se montre maintenant plus offensive que la Fed. Les attentes du marché nous semble trop élevées. La BCE devrait resserrer son taux directeur dès juillet, avec l’objectif de sortir des taux négatifs en septembre. La Fed pourrait réduire le rythme de son resserrement monétaire à partir de l’automne si l’inflation décélère suffisamment.
- Les taux d'intérêt continuent de se tendre, mais cette fois-ci davantage en Allemagne qu’aux États-Unis. La volatilité reste élevée et la liquidité se détériore. Nous avons revu nos objectifs de taux à 1% pour le Bund allemand dans 12 mois et à 2,75% pour le bon du Trésor américain à 10 ans. Nous anticipons une courbe des taux américaine plate dans 12 mois. Opinion Neutre sur les obligations d'État à long terme et Positive sur les obligations d'État américaines à court terme pour les investisseurs en dollar.
- Obligations souveraines italiennes : Les valorisations sont en train de s’ajuster à une nouvelle ère sans achats nets de la BCE. Les réinvestissements des obligations arrivant à échéance faits par la BCE limiteront les risques, sans les éliminer. Le spread italien pourrait continuer à s’écarter. Les obligations souveraines italiennes devraient sous-performer les obligations d'État allemandes. Préférer les obligations d'État à maturité courte.
Banques centrales
Combattre l'inflation à tout prix ?
Banque centrale européenne (BCE)
Normalisation progressive mais soutenue : Sans surprise, la BCE a décidé de stopper ses achats nets d’obligations au 1er juillet et d’augmenter ses taux ensuite, en juillet (25pb), en septembre (25pb ou plus) et surement au-delà.
Notre vue : La BCE va tenir son engagement du fait de la vigueur de l’inflation (cf graphique), de la faiblesse de l’euro et des projections économiques qui voient une inflation supérieure à l’objectif de 2 % (2,1%) en 2024. Notre scénario initial d’un taux dépositaire à 1% fin 2023 va être revu à la hausse.
Anticipation du marché : Le marché anticipe un resserrement monétaire agressif, avec un taux dépositaire proche de 2% fin 2023.
Risque : Le risque de fragmentation de la zone euro, c’est-à-dire un écartement des spreads dans la zone euro non justifié par les fondamentaux, est réel. Pour l’éviter, la BCE insiste sur la flexibilité qu’elle a pour allouer les réinvestissements obligataires aux pays où les spreads se sont le plus écartés. De plus, elle travaille sur un nouvel outil pour atteindre ce but.
Réserve fédérale américaine (Fed)
La Fed doit faire plus : Les anticipations d’inflation ne se sont détendues que trop légèrement (cf graphique). Les conditions monétaires se sont assouplies depuis un mois. L’inflation décélère trop lentement.
Conséquence : Les minutes de la dernière réunion de politique monétaire laissent transparaitre que ses membres souhaitent des hausses de taux audacieuses maintenant afin d’avoir plus de flexibilité plus tard.
Notre vue : Notre scénario est conforté par les minutes de la Fed. Nous anticipons une hausse de taux de 50 pb aux 2 prochaines réunions de la Fed (juin et juillet) puis des hausses plus réduites de 25bp car l’inflation devrait décélérer suffisamment et les risques sur la croissance devraient s’accroitre. Nous voyons un taux terminal à 2,75% fin 2023.
Anticipation du marché : Les anticipations ont été revues à la baisse. Le taux terminal est retombé à 3%.
Gestion du bilan : La Fed a commencé à réduire son bilan en juin en cessant de réinvestir une partie de ses obligations arrivant à échéance.
CONCLUSION
La Fed et la BCE veulent resserrer leurs taux directeurs pour combattre l’inflation. En revanche, la dynamique est en train de changer puisque c’est maintenant la BCE qui se montre plus offensive que la Fed. La BCE devrait resserrer son taux directeur dès juillet, avec l’objectif de sortir des taux négatifs en septembre. La Fed pourrait réduire le rythme de son resserrement monétaire à partir de l’automne si l’inflation décélère suffisamment.
Rendements obligataires
Des mouvements massifs
Changement de dynamique : Les taux ont continué à se tendre dernièrement, mais cette fois-ci nettement plus en Allemagne qu’aux États-Unis, du fait des discours fermes des banquiers centraux européens et à cause de l'inflation qui a surpris à la hausse.
Objectifs de taux : Nous avons revu nos objectifs à la hausse pour les taux allemands, à 0,5% pour le taux à 2 ans et à 1% pour le taux à 10 ans dans 12 mois. Les taux actuels sont supérieurs à nos objectifs et devraient le rester encore quelques mois car l'inflation pourrait continuer à surprendre à la hausse jusqu'à l'automne. Aux États-Unis nous anticipons des taux dans 12 mois plus bas qu’aujourd'hui car l'inflation devrait ralentir , ce qui incitera la Fed à être moins agressive dans son cycle de resserrement monétaire, d’autant plus que la croissance devrait décélérer. Nous voyons une courbe des taux plate, à 2,75% dans 12 mois.
Notre vue : Nous sommes Neutres sur les obligations à long terme et Positifs sur les obligations américaines à court terme pour les investisseurs basés en dollar.
CONCLUSION
Les taux d'intérêt continuent de se tendre, mais cette fois-ci davantage en Allemagne qu’aux États-Unis. La volatilité reste élevée et la liquidité se détériore. Nous avons revu nos objectifs de taux à 1% pour le Bund allemand dans 12 mois et à 2,75% pour le bon du Trésor américain à 10 ans. Nous anticipons une courbe des taux américaine plate dans 12 mois.
Thème du mois
L’Italie, de retour sous les projecteurs
Les obligations souveraines des pays périphériques à la zone euro (Italie, Grèce, Espagne, Portugal) souffrent depuis le début de l’année (cf graphique). Avec les tensions sur les taux d’intérêt et l’écartement des primes de risque, l’Italie, gros émetteur de la zone euro, est revenue sur les devants de la scène.
>200pb : La perception du risque a augmenté. Le spread italien (écart entre le rendement de l’obligation italienne à 10 ans et allemande à 10 ans) a dépassé la barre symbolique de 200pb (cf graphique).
>3% : Le rendement de l’obligation italienne à 10 ans s’est tendu à 3,4%. Le rendement élevé se justifie par les risques existants.
Risque lié à la BCE : La BCE va stopper ses achats nets d’obligations vers le 1er juillet. Sa part devra être absorbée par les investisseurs.
Risque lié au refinancement : Le retrait de la BCE arrive à un moment où l’Italie a des besoins de refinancement conséquents (500Mds EUR dans les 18 prochains mois), dans un contexte où les taux d’intérêt sont plus élevés, où l’Italie fait face à une croissance
molle et une inflation élevée et où les risques de récession planent sur la zone euro. La crainte de la viabilité de la dette pourrait revenir.
Risque lié aux élections : Même si elles ne sont prévues qu’avant le 1er juin 2023, les pourparlers vont commencer après l'approbation du budget en octobre/novembre.
Soutien relatif de la BCE : Les obligations arrivées à échéance seront réinvesties. La BCE pourrait en théorie rediriger tous les réinvestissements du PEPP vers les pays dont les spreads se sont le plus écartés pour éviter une fragmentation de la zone euro.
Soutien à long terme de l'UE : La levée de dette commune (programmes NextGen, Repower EU) est un grand pas vers plus d’intégration et de transferts au sein de la zone euro à long terme.
Conclusion : Nous sommes Neutres sur les obligations d'État italiennes. Les spreads pourraient encore s’écarter. Quand la BCE avait stoppé ses achats nets en janvier-juillet 2019, les spreads évoluaient entre 250 et 275pb. Préférer les obligations à maturité courte.
CONCLUSION
Les spreads des obligations périphériques sont en train de s’ajuster à une nouvelle ère sans achats nets de la BCE. Les réinvestissements des obligations arrivant à maturité faits par la BCE limiteront les risques sans les éliminer. Le spread italien pourrait continuer à s’écarter. Les obligations souveraines italiennes devraient sous-performer les obligations d'État allemandes. Préférer les obligations d'État à maturité courte.