Perspectives mensuelles sur les marchés obligataires - Mai

Résumé
- La Fed a commencé à normaliser sa politique monétaire. La BCE est sur le point de le faire. Les deux tiennent des discours agressifs de manière à ne pas laisser les anticipations d’inflation déraper. In fine, elles pourraient se contenter de moins de hausses de taux que prévu par le marché.
- Le mouvement haussier continue sur les taux, avec une forte volatilité. La dynamique a cependant changé puisque les anticipations d’inflation semblent avoir atteint un pic alors que les taux réels continuent de monter. Nos objectifs de taux à 10 ans sont à 2,50% aux États-Unis et 0,75% en Allemagne. Nous sommes Neutres sur les obligations d'État à long terme. Nous restons positifs sur les obligations d'État américaines à court terme pour les investisseurs en dollar.
- Vue sur le Crédit: L’environnement macroéconomique s’est détérioré mais les entreprises sont, en moyenne, en bonne santé financière. Il ne devrait donc pas y avoir de remontée significative des taux de défaut. Cependant, les spreads de crédit pourraient d’écarter encore un peu. Les valorisations sont devenues plus attractives, mais pas encore bon marché. Nous sommes Neutres sur les obligations d’entreprises, avec une préférence pour les obligations de qualité.
Banques centrales
Combattre l'inflation à tout prix ?
Banque centrale européenne (BCE)
Constat de la BCE : L’inflation est trop élevée et les risques sur la croissance sont élevés.
Décisions de la réunion d’avril : Le programme d’achats nets pourrait s’arrêter au Q3 et une hausse de taux pourrait survenir quelques temps après.
Notre vue : La BCE se montre ferme pour calmer les anticipations d’inflation à long terme. Le risque d’avoir un inflation élevée pour plus longtemps n’est pas négligeable du fait du conflit Russie-Ukraine. Plusieurs membres de la BCE plaident pour une hausse des taux dès juillet. Cependant, il n’y a pas de spirale prix-salaire en zone euro (cf graphique) mais un rattrapage des salaires est possible au Q3-Q4. Selon nous, la BCE terminera son programme d’achats d’actifs nets début Q3 puis procédera à deux hausses de taux cette année (septembre et décembre). Nous tablons sur 3 hausses de taux l’an prochain, ce qui mènerait le taux dépositaire à 0,75% et le taux principal de refinancement à 1% fin 2023. Le marché anticipe un taux dépositaire à 1,2% fin 2023, ce qui nous semble peu probable étant donné les risques qui pèsent déjà sur la croissance.
Réserve fédérale américaine (Fed)
Constat de la Fed : L’inflation est beaucoup trop élevée, l’économie est solide et au plein-emploi.
Décisions de la réunion de mai : La Fed va resserrer la politique monétaire avec 1) une série de hausses de taux (+50bps en mai actés) et 2) une réduction des liquidités car la Fed va réduire la taille de son bilan de manière non agressive (pas de ventes actives de bons du Trésor ou de MBS) à partir du 1 juin. Cf graphique.
Notre vue : L’objectif de la Fed est d’éviter une spirale prix-salaire et de calmer les anticipations d’inflation à long terme car elles sont trop élevées (2,8%). La Fed se montre donc ferme et promet davantage de hausses de taux. Cependant, l’inflation devrait commencer à ralentir dès le second semestre et la croissance économique devrait être moins ferme l’année prochaine. La Fed pourrait donc ne pas délivrer autant de hausses de taux que ce que le marché escompte (185bps en plus d’ici la fin de l’année et un taux Fed funds à 3,0% fin 2023). Nous tablons sur 150bps de hausses de taux supplémentaires, dont 50 en juin et juillet et un taux Fed funds à 2,75% fin 2023.
CONCLUSION
La Fed et la BCE veulent combattre l’inflation et calmer les anticipations d’inflation à long terme. Le marché anticipe une remontée agressive des taux directeurs, mais il est probable que les banques centrales puissent se contenter de moins de hausses de taux que prévu car l’inflation devrait décélérer à partir du second semestre et la croissance devrait ralentir l’an prochain.
Rendements obligataires
Des mouvements massifs
La volatilité sur les taux est élevée, proche des niveaux vus au début de la pandémie.
Les taux nominaux à 10 ans ont continué de se tendre aux États-Unis et en zone euro (voir graphique), sous l’impulsion des taux réels. Les anticipations d’inflation en revanche ont décru, ce qui suggère que les banques centrales sont crédibles dans leur lutte contre l’inflation.
Nos objectifs de taux à 10 ans dans 12 mois sont à 2,50% aux États-Unis et 0,75% en Allemagne. Nous pensons que les taux pourraient se tendre encore un peu car l’inflation va rester élevée et les conditions financières ne sont pas encore restrictives. Ceci dit, l’inflation devrait décélérer au second semestre grâce aux effets de base et la croissance pourrait montrer des signes de faiblesse. Des lors, les taux à long terme devrait baisser par rapport aux niveaux actuels à horizon 12 mois.
Nous sommes Neutres sur les obligations à long terme et Positifs sur les obligations américaines à court terme pour les investisseurs basés en dollar.
CONCLUSION
Le mouvement haussier continue sur les taux, avec une forte volatilité. La dynamique a cependant changé puisque les anticipations d’inflation semblent avoir atteint un pic alors que les taux réels continuent de monter suite au durcissement monétaire initié par les banques centrales. Nos objectifs de taux à 10 ans sont à 2,50% aux États-Unis et 0,75% en Allemagne.
Thème du mois
Vue sur le Crédit
Le cycle du crédit est à un stade avancé. La phase de reprise est derrière nous et nous entrons dans une phase d’expansion de fin de cycle. Celle-ci est généralement associée à des performances négatives et une plus grande volatilité.
Fondamentaux solides. En moyenne, les entreprises ont des bilans solides grâce à la croissance économique et les bons résultats dégagés l’an dernier (cf graphique), ainsi qu’un endettement plus faible. De plus, les entreprises se sont massivement refinancées à des taux extrêmement bas l’an dernier.
Données techniques en détérioration. L’offre obligataire devrait rester soutenue pour les émetteurs Investment Grade mais être plus faible de la part des émetteurs High Yield. La demande devrait baisser en lien avec les retraits des banques centrales (fin des achats nets de la BCE et début du quantitative tightening de la Fed).
Environnent macroéconomique en détérioration. Le risque géopolitique s’est accru.
Les conditions financières sont moins favorables qu’avant. Le hausse des coûts de production devrait peser sur les marges à terme.
Les spreads de crédit pourraient s’écarter davantage en raison de la dynamique offre/demande et de l’environnement macroéconomique plus difficile, qui pourrait amener quelques défauts de paiement parmi les entreprises les plus fragiles. En revanche, la bonne santé financières des entreprises en moyenne devrait empêcher une vague significative de défaut et donc un écartement des spreads de crédit massif.
Les valorisations sont devenues plus attractives, mais pas encore bon marché (cf graphique), suite à la remontée des rendements obligataires et l’écartement des spreads de crédit.
Nous avons une vue Neutre sur le crédit. Nous sommes plutôt défensif dans cet environnement plus difficile et privilégions des obligations Investment Grade par rapport au High Yield.
CONCLUSION
L’environnement macroéconomique s’est détérioré mais les entreprises sont, en moyenne, en bonne santé financière. Il ne devrait donc pas y avoir de remontée significative des taux de défaut. Cependant, les spreads de crédit pourraient d’écarter encore un peu. Les valorisations sont devenues plus attractives, mais pas encore bon marché. Nous sommes Neutres sur les obligations d’entreprises, avec une préférence pour les obligations de qualité.