Nouvelle période d’aversion pour le risque

Début août, une nouvelle phase de baisse des bourses a commencé, déclenchée par une nouvelle tension dans les relations sino-américaines et la menace de la mise en place d’une taxe de 10% sur 300 milliards de produits chinois importés aux Etats-Unis à partir de septembre. La fin de la trêve décidée à Osaka entre les présidents chinois et américain a eu un impact immédiat sur les actifs risqués. Le Renminbi vient de passer au-dessus de 7 pour un $ et les autorités chinoises viennent d’annoncer un gel des achats de produits agricoles américains
A ces tensions commerciales s’ajoutent d’autres inquiétudes politiques ; citons notamment
- la question du Brexit, avec la nouvelle approche de M. Johnson et la probabilité plus élevée d’un Brexit sans accord avec l’Union Européenne,
- les problèmes politiques à Hong Kong, questions sérieuses pour les autorités chinoises bien qu’elles ne soient pas susceptibles d’avoir un fort impact économique,
- les tensions entre l’Iran et les Etats-Unis
Les derniers chiffres économiques ne sont pas de nature à éteindre ces inquiétudes politiques : par exemple, le rapport sur l’emploi américain publié vendredi 2 août a dépeint un marché du travail solide, avec le plein emploi et des salaires en hausse (+3.2%). Mais, le même jour, des indicateurs avancés d’activité (ISM et PMI manufacturiers) ont ravivé les inquiétudes sur l’absence de croissance dans l’industrie. De même en Europe, les chiffres publiés ces derniers jours sont plus faibles qu’attendus d’une manière générale
Pour les marchés financiers, ces données économiques ne sont pas une surprise puisqu’ils expliquent les dernières décisions des banques centrales : la Réserve fédérale américaine a baissé ses taux le 31 juillet, comme escompté, et la BCE a annonçé de nouvelles mesures d’accommodation monétaire pour l’automne
L’escalade des tensions commerciales entre Chine et Etats Unis est donc un élément supplémentaire auquel les banques centrales ne pourront pas réagir avant leurs prochaines réunions en septembre. Durant ce mois d’août, les anticipations de nouvelles baisses de taux se développent ; les marchés intègrent maintenant une probabilité de 100% d’une nouvelle baisse des taux Fed en septembre
L’ensemble des marchés obligataires est impacté par ce mouvement d’aversion au risque : les taux obligataires ont massivement baissé. Toute la courbe des taux allemande est en territoire négatif (jusqu’au taux à 30 ans !). Le montant total des obligations qui traitent aujourd’hui à taux négatif est de 14.5 trillions de dollars, dont 50% en eurozone. (Voir le flash du 23 juillet de E. Desbonnets « Les rendements négatifs se propagent. Une aberration qui deviendra la norme ? »)
Ce mouvement de marché obligataire nous surprend par son ampleur
Nous ne changeons pas notre stratégie d’investissement prudente et restons négatifs à court terme sur les actions, sur l’ensemble de la classe d’actifs. Nous recommandons depuis début juin des prises de bénéfices car les révisions en baisse des profits des entreprises nous semblent justifier des ratios de valorisation plus modérés. A long terme, nous sommes neutres car nous n’anticipons pas de récession globale. Nous continuons de mettre en avant une stratégie défensive, en termes de secteurs (santé, immobilier) et en termes de sélection de valeurs. La prudence reste de mise car les tensions sur les marchés ne sont pas encore extrêmes. Les incertitudes mentionnées vont durer
Une des couvertures que nous recommandons est l’or
Nous restons positifs sur le métal jaune. Sa hausse est d’autant plus remarquable que le dollar est resté fort. Avec des taux d’intérêt aussi bas, la détention d’or reste favorisée puisque son coût est bas. L’or permet de réduire la volatilité des portefeuilles en les diversifiant
Pour que nous changions de point de vue et devenions plus positifs, il faudrait que les marchés financiers corrigent davantage et sur une période plus longue, pour que les indices reviennent vers leurs moyennes mobiles longues. Autre condition, que les politiques économiques soient ajustées plus significativement à cet environnement de croissance plus faible. Or, les banques centrales n’ont pas beaucoup de munitions puisque les taux sont déjà très bas. Il faudrait donc que la politique fiscale prenne le relai. Un pays à suivre tout particulièrement est la Chine, locomotive de la croissance de l’économie mondiale. Ce pays a des marges de manœuvre en terme de politique de relance. Enfin, de bonnes nouvelles sur les négociations commerciales ou sur le Brexit ne sont pas impossibles, qui sait !?