#Stratégie d'investissement — 05.06.2019

Prudence accrue envers les marchés actions

Roger Keller

L’anticipation d’une persistance des incertitudes de natures politique et économique nous amène à devenir négatifs envers les bourses à court terme et neutres à horizon moyen terme.

BNP Paribas - Actions

Cela se reflète dans un abaissement à neutre de notre opinion envers la Chine et par extension envers les marchés émergents. Au niveau de l’approche sectorielle, notre vue devient négative sur les industrielles et – tactiquement - neutre envers les financières.

 

Adoption d’une vue négative à court terme…

Nous ne partageons pas l’optimisme de ceux qui attendent de la réunion du G20 prévue les 28 et 29 juin prochains à Osaka une annonce d’accord commercial entre les Etats-Unis et la Chine. La rhétorique récente empêche les deux parties de trouver un terrain d’entente dans un laps de temps si court. Nous anticipons néanmoins un engagement de leurs parts à la poursuite du dialogue. Les incertitudes politiques touchent aussi d’autres régions du globe, comme l’Europe avec le Brexit et l’Italie. 

Par ailleurs, l’évolution des bourses est étroitement corrélée à celle des indices des directeurs d’achats. Divers indicateurs laissent entrevoir qu’un retournement favorable de ces indices n’est pas imminent. Cela milite en faveur d’une prudence à court terme. 

La saisonnalité est un autre facteur alimentant cette prudence. Selon des données concernant la bourse américaine et en remontant à 1950, une analyse de la performance d’un placement boursier après 6 mois montre que le mois de mai est le plus mauvais moment pour entrer en bourse, suivi d’avril et juin. 

La combinaison entre persistance durable des incertitudes de nature politique, économique et une saisonnalité défavorable nous incite à adopter une vue négative à court terme. 


… et neutre à moyen terme 

La relation entre le risque et le potentiel d’un placement boursier n’est pas attrayante dans les circonstances actuelles. 

Le potentiel haussier est contraint par des valorisations qui reflètent déjà beaucoup d’attentes positives et des perspectives bénéficiaires très modestes. Bien que le consensus ait réduit ses projections de croissance des bénéfices de moitié en quelques mois, il reste encore un risque de révision supplémentaire aux 4% de croissance actuellement affichés pour 2019. Quant aux attentes pour 2020, à +10,5%, elles nous semblent exagérées et elles devraient être corrigées déjà dès la prochaine période d’annonce des résultats qui s’ouvrira en juillet. 

Tablons-nous sur une baisse significative des bourses? Non. L’engagement attendu de la Chine et des Etats-Unis à poursuivre le dialogue, le positionnement prudent des investisseurs et l’utilisation par le Président Trump de la bourse comme baromètre de son succès réduisent les risques baissiers. La Réserve fédérale vient par ailleurs de communiquer qu’elle se tient prête à baisser les taux d’intérêt si cela devait se révéler nécessaire. 

Le mix entre un potentiel haussier très limité et l’existence de risques politiques et économiques non-négligeables, même si nous n’anticipons pas leur survenance, milite pour une opinion neutre envers les bourses à moyen terme.

 

Abaissement de notre opinion envers les émergents à neutre 

Notre nouveau scénario central, qui voit la persistance des incertitudes politiques pendant plusieurs mois, nous a incité à revoir notre opinion sur la bourse chinoise. Nous l’abaissons à neutre dans la perspective d’une hausse de la volatilité des cours et de risques d’érosion de la confiance des entreprises et de la croissance des bénéfices. 

Etant donné le poids important de la Chine dans l’indice des marchés émergents – un tiers de l’indice – nous abaissons notre opinion envers les émergents à neutre.

 

Conséquences sectorielles 

Nous poursuivons notre dégradation de notre opinion envers les valeurs industrielles. Cette opinion devient négative après la revalorisation connue par ce secteur et la détérioration de l’environnement, que ce soit au niveau des coûts ou des perspectives  d’investissement dans les infrastructures et équipements.

 

Les financières subissent un abaissement tactique de notre opinion à neutre pour refléter l’abaissement de nos objectifs de cours sur les obligations gouvernementales et l’impact sur l’activité d’une conjoncture devenant plus incertaine. Le secteur reste néanmoins bon marché et les dividendes sont attrayants.

 

Quels sont nos placements boursiers favoris dans ce contexte ? 

Nous ne modifions pas nos préférences au sein des marchés actions développés. Elles vont toujours vers la zone euro, objet d’un excès de pessimisme, et le Japon, qui offre un potentiel de revalorisation.

 

Au sein des  marchés émergents, la Corée du Sud reste attrayante, grâce à sa faible valorisation et des attentes consensuelles  peu élevées, ainsi que Singapour, dont le dividende est élevé et les valorisations sont attrayantes. Nous devenons positifs sur l’Inde après une élection qui donne un fort mandat au Premier Ministre Narendra Modi pour accélérer les réformes.

 

Nos préférences sectorielles vont vers la pharma, l’immobilier hors Royaume-Uni et, en zone euro, vers l’énergie et les équipementiers télécoms.

 

Finalement, les grosses capitalisations sont préférées aux petites et moyennes capitalisations.

 

Conclusion

Nous n’anticipons pas encore la fin du « bull market » mais les prochains mois devraient subir une forte volatilité et les risques sont élevés. La préservation du capital prend le dessus dans nos considérations.