Marchés actions : L’énergie, trappe à valeur ou bien opportunité d’achat ?
Avec la forte baisse du prix du baril, les pétrolières souffrent depuis le début de l’année.
Les valeurs pétrolières sous-performent depuis le début d’année. Elles ont été pénalisées par la chute rapide du prix du baril. Entre janvier 2017 et juin 2017, le baril de Brent a perdu 20%, passant de 55UD à 45USD. Depuis quelques mois, les investisseurs ont des doutes grandissants concernant la capacité de rééquilibrage entre l’offre et la demande de pétrole. Fin 2016, l’accord de réduction de la production (1) entre les membres de l’OPEP auxquels la Russie s’était associée, avait laissé augurer une réduction de l’offre et la possibilité d’une baisse rapide des surcapacités. Toutefois, depuis février, les investisseurs sont de moins en moins convaincus d’une telle issue. La production de pétrole et les stocks de brut restent élevés. Faute de matérialisation concrète, le rééquilibrage annoncé devient plus hypothétique. La stratégie de l’OPEP est alors perçue par les investisseurs comme un échec. Plusieurs facteurs récents ont joué en défaveur du pétrole. Tout d’abord, la Lybie et le Nigéria – exemptés de quotas lors des derniers accords de l’OPEP – ont repris leur production. Même si leur retour sur le marché était attendu, l’augmentation de la production des deux pays nuit au rebond du baril. Ensuite, la saison estivale, propice aux déplacements aux Etats-Unis (« driving season »), tarde à s’annoncer. Enfin, avec la production pléthorique de pétrole américain non conventionnel (pétrole de schiste), l’offre mondiale reste abondante. Les producteurs américains peuvent en effet produire à des coûts toujours plus faibles grâce aux progrès techniques. Ils ont par ailleurs la capacité de relancer leur activité rapidement dès que le cours du baril repart à la hausse. La production américaine s’invite donc à chaque rebond du pétrole, bloquant tout espoir de reprise substantielle. A l’inverse, un plancher semble s’être établi : un cours trop bas pose des problèmes de rentabilité pour certains sites de forage américains. Avec ces forces disruptives pour l’ensemble du secteur, le prix du baril tend à varier entre 45USD et 60USD depuis maintenant quelques trimestres.
Nous restons toutefois convaincus que le rééquilibrage offre/demande va s’opérer au cours des douze prochains mois. Certes, le processus de rééquilibrage sera lent, mais nous constatons que :
- L’OPEP n’a pas d’autres choix que d’imposer une réduction de l’offre. La volonté de l’Arabie Saoudite et de la Russie est plus ferme que ce que le marché estime. Les termes de l’accord de l’OPEP ont été confirmés fin mai 2017. Si ce dernier est correctement suivi, nous pourrions rapidement entrer dans une période de déficit de production et donc de réduction des stocks de pétrole au niveau mondial.
- Avec la poursuite de la reprise économique, la demande de pétrole progressera. Notre scénario attend une croissance économique plus forte en 2017. Le marché sous-estime cet effet positif. La demande devrait être aussi soutenue par des effets saisonniers (driving season aux Etats-Unis, météo plus chaude en Asie et au Moyen-Orient).
- Un baril à 45-50USD pose des problèmes de rentabilité des sites de forage américains. Sauf en cas de nouveaux progrès techniques ou bien d’un soutien fiscal de la part des autorités américaines, les producteurs de pétrole de schiste américains sont proches de leur point mort même si, il faut le reconnaitre, ce niveau n’est pas défini clairement. En découleront une baisse du nombre de sites de forage et donc une réduction de la production aux Etats-Unis.
En conséquence, le baril devrait, selon nous, repartir à la hausse sans toutefois pouvoir dépasser les 60 USD. Si le baril s’avère être plus haut au cours du second semestre 2017, les valeurs pétrolières constituent dans ce cas une opportunité d’achat. Elles s’échangent aujourd’hui à des niveaux de valorisation faibles : Moins de 14 fois les bénéfices en Europe, soit bien en-dessous de leurs moyennes. Les craintes d’une coupe de dividende – comme en 2015, après l’effondrement du baril à près de 25USD – nous semblent excessives. En 2015-2016, la plupart des entreprises dans le secteur avaient réussi à sécuriser leur dividende en annulant d’importants projets d’investissement. Dès lors, les pétrolières intégrées devraient délivrer des flux de trésorerie solides, à la fois soutenus par la maîtrise des dépenses d’investissement et d’un rebond du prix du baril au second semestre.
Par ailleurs, les investisseurs n’ont pas sanctionné les pétrolières intégrées avec la même violence que le baril sur les cinq derniers mois. Les pétrolières intégrées ont même été plutôt résilientes. Ces sociétés offrent en effet une diversification intéressante (activités en amont et en aval,…) ce qui réduit le risque. Elles offrent également un dividende élevé (7% en Europe). Elles n’ont cédé du terrain que depuis juin et sont aujourd’hui survendues. Un scénario pessimiste pour le pétrole semble donc être largement intégré par le marché.
Il semble en revanche encore trop tôt pour espérer un regain d’intérêt pour les parapétrolières. L’activité de ces dernières dépend des plans d’investissement des majors pétrolières. Avec le report des projets de ces dernières années, les besoins sont importants, mais la plupart des acteurs du secteur restent frileux. Une reprise des dépenses d’investissement est donc peu probable à court terme et l’absence d’un rebond spectaculaire du baril dans nos prévisions altère les chances de surperformance de l’industrie.
1) Une baisse de 1,2m/baril/jour a été entérinée par les membres de l’OPEP lors de leur réunion en novembre 2016. L’accord est valable à partir du 1er janvier 2017.