Tensions commerciales internationales
Anticiper la redistribution des rôles en Asie
Déjà avant l'apparition des tensions commerciales sino-américaines, les fabricants commençaient à transférer leurs chaînes d'approvisionnement de la Chine vers des régions à bas prix comme l'Asie du Sud-Est, l'Inde, l'Europe de l'Est, le Mexique, etc. Le conflit commercial qui se profile doit alerter les entreprises quant à l'importance de la diversification de leurs bases de production.
Nous pensons que les tensions commerciales vont accélérer cette tendance. Nous identifions ici les secteurs qui bénéficieront de ce changement et de la modernisation des chaînes d'approvisionnement et nous analysons leurs effets d'entraînement sur les marchés locaux de la consommation à moyen et long terme.

NOS RECOMMANDATIONS |
Ce thème porte sur les secteurs et les entreprises des marchés émergents qui bénéficieront du transfert et de la modernisation des chaînes d'approvisionnement ainsi que sur le nouveau corridor commercial qui pourrait être instauré si les tensions commerciales persistent. Nous recommandons d'investir dans les secteurs suivants :
Il s'agit d'un thème d'investissement pluriannuel. L'horizon d'investissement recommandé est de 1 an ou plus. |
Les tensions commerciales, un catalyseur de l'amélioration des chaînes d'approvisionnement ?
Dans les années 1980, la forte appréciation du dollar a mis en difficulté un certain nombre de secteurs d'activité aux États-Unis, conduisant à la signature de l'Accord Plaza en 1985 (visant à dévaluer le dollar par rapport au yen et au deutsche mark). Par la suite, le Japon et l'Allemagne ont été confrontés à une dégradation significative de leurs termes de l'échange. Cela a toutefois permis à leurs industries respectives de progresser sur l'échelle de la valeur ajoutée dans les années 1990 afin de regagner des parts de marché.
La Chine pourrait également connaître la même évolution. Depuis près de dix ans, de nombreux fabricants ont transféré une partie de leur chaîne d'approvisionnement vers d'autres marchés émergents pour (i) tirer parti de la baisse des salaires et des prix abordables du foncier, et (ii) gravir l'échelle de la valeur. Les tensions commerciales ont contraint les entreprises à rechercher des moyens de se protéger contre les risques et de réduire les coûts, ce qui devrait accélérer le processus de transfert et d'amélioration de leurs chaînes d'approvisionnement pour en réduire la longueur, raccourcir les délais d'approvisionnement et/ou les régionaliser afin d'en accroître l'efficacité.
Qui seront les bénéficiaires des nouvelles politiques commerciales ?
1. Une rotation des parts de marché
Les données récentes sur le commerce indiquent que certains marchés européens et émergents ont déjà pris des parts de marché à la Chine. L'analyse approfondie de ces données montre que l'imposition de la hausse de 25 % des droits de douane américains sur 34 milliards USD de produits chinois à compter de juillet 2018 s'est traduite par une baisse de la part de marché de la Chine dans les exportations de machines et d'équipements électriques vers les États-Unis, au profit de l'Allemagne, du Canada, de la France, du Mexique et de la Thaïlande.
2. L'automatisation et la robotique
La délocalisation et la modernisation des sites de fabrication impliquent une hausse des dépenses d'investissement et une accélération de l'automatisation. Cette dernière devrait jouer un rôle majeur tout au long de la chaîne d'approvisionnement, en favorisant la fourniture de services à plus forte valeur ajoutée aux clients, avec par exemple une plus grande attention portée à la « production verte », à la conception ou encore à la livraison à temps (cycle de commande plus court). Cela nécessiterait des entrepôts intelligents (gérés par des robots), une automatisation accrue des processus d'assemblage et de conditionnement (pour une cadence élevée) ainsi que des processus des entreprises logistiques.
3. Les centres de production existants
Certains pays émergents, qui disposent déjà des infrastructures et des réseaux de production nécessaires, devraient bénéficier de la délocalisation des capacités de production d'un plus grand nombre d'entreprises. Ainsi, l'Inde dispose d'infrastructures de production de logiciels, la Thaïlande et l'Indonésie sont équipées pour les secteurs de l'automobile et des composants, et la Malaisie pour les panneaux solaires. En parallèle, le Vietnam est sur le point de devenir un important centre de production manufacturière pour l'industrie de basse technologie.
4. Un nouveau corridor commercial
La démographie favorable et la croissance rapide des classes moyennes en Asie du Sud-Est pourraient renforcer le corridor commercial Nord-Sud (en Asie), réduisant ainsi la dépendance à l'actuel corridor Est-Ouest (Chine-États-Unis/Europe). Ce processus est facilité par l'accord de libre-échange entre la Chine et l'ASEAN. Les compagnies maritimes, les ports, les acteurs du commerce électronique, les banques et les sociétés de logistique possédant des capacités intrarégionales pourraient bénéficier de la croissance du commerce intrarégional.
5. Des effets d'entraînement
La redistribution de la production devrait faire progresser l'emploi et les revenus sur les marchés locaux, ce qui devrait favoriser la consommation, notamment les produits d'électroménager et d'électronique grand public ainsi que les biens de consommation locaux (grossistes et détaillants).
Conclusion
Il est difficile d'ignorer le rôle essentiel du poids lourd qu'est la Chine dans la chaîne d'approvisionnement mondiale. Néanmoins, le secteur manufacturier avait déjà amorcé une transition avant l'apparition des tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis car de nombreuses entreprises recherchaient des sites de production moins onéreux par de nombreuses entreprises Les menaces de perturbation de la chaîne d'approvisionnement dues aux conflits commerciaux en cours inciteront probablement davantage d'entreprises à diversifier leurs bases de production.
Le transfert des sites de fabrication et la modernisation des chaînes d'approvisionnement sont des processus extrêmement longs et complexes. De toute évidence, les changements ne se produisent pas du jour au lendemain. L'impact positif sur les entreprises/secteurs qui tireront leur épingle du jeu pourrait n'être visible qu'à moyen et long terme.
PRINCIPAUX RISQUES |
Le principal risque lié à ce thème d'investissement réside dans la réalisation ou non des scénarios extrêmes d'escalade des tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis : 1. Scénario extrême positif : Les États-Unis et la Chine concluent un accord commercial caractérisé par des liens inédits de coopération stratégique sous tous les plans. 2. Scénario négatif extrême : Une véritable guerre commerciale éclate, échappant à tout contrôle et plongeant l'économie mondiale en récession. Ces évolutions politiques auraient un impact significatif sur les décisions commerciales des entreprises en matière de chaîne d'approvisionnement. |
