#ISR — 14.10.2021

Une énergie propre pour des retours sur investissement durables

Arnaud Tellier, CEO APAC, BNP Paribas Wealth Management

Alors que la lutte contre le changement climatique devient plus urgente, le développement des énergies renouvelables présente de nombreuses opportunités pour les investisseurs.

clean energy

Le septième des 17 objectifs de développement durable des Nations Unies est étroitement lié à nos thèmes d’investissement ESG. Il vise à « assurer l’accès à une énergie abordable, fiable, durable et moderne » pour tous, et est au cœur de nombreuses opportunités d’investissement découlant de l’obligation de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) à zéro net d’ici 2050.

En effet, la production d’énergie actuelle repose encore massivement sur la combustion des énergies fossiles et émet une trop grande quantité de carbone.  Même si la pandémie a entraîné une baisse de la consommation d’énergie, l’Association Internationale de l’Energie (AIE) a enregistré 31,5 gigatonnes (Gt) d’émissions de dioxyde de carbone (CO2) liées à la production et à la consommation d’énergie ainsi qu’à la concentration de CO2 la plus élevée jamais enregistrée dans l’atmosphère en 2020.[1] Ces émissions sont à l’origine du réchauffement climatique qui alimente des phénomènes météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents et graves tels que les ouragans, les inondations, les sécheresses et les incendies de forêts.

Le Sixième rapport d’évaluation du GIEC publié le 9 août 2021 confirme les conclusions scientifiques précédentes dues à l’activité humaine, et rappelle aux gouvernements d’accélérer la décarbonisation prévue dans leurs programmes politiques. Cette étude souligne que les concentrations atmosphériques cumulées de GES sont déjà élevées : les niveaux de CO2 en 2019 étaient les plus élevés depuis deux millions d’années, tandis que le méthane (CH4) et l’oxyde nitreux (NO2) étaient les plus élevés depuis 800 000 ans. Le rapport invite les ministres participant à la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique, qui se tiendra à Glasgow en novembre 2021 (COP26), à élever leur niveau de décarbonisation.[2]

L’élimination du CO2 nécessitera d’énormes investissements : pour atteindre zéro émission nette d’ici 2050 et limiter l’impact du réchauffement climatique, l’AIE estime que les dépenses mondiales en énergie propre devront plus que tripler, pour atteindre environ 4 milliards de dollars par an d’ici 2030.[3]

Le charbon coupable

De nombreux pays dépendent encore des centrales thermiques pour produire de l’électricité. 40 % des émissions de CO2 liées à l’énergie proviennent de la combustion fossile. Alors que les pays riches passent à des ressources énergétiques alternatives, on ne peut pas obliger les pays en développement à arrêter de déployer l’électricité vers les communautés mal desservies. Pour ces pays, la décarbonisation s’accompagne d’une distribution de l’électricité à une plus grande partie de la population en même temps.

Heureusement, le coût des énergies renouvelables continue de baisser à mesure que les technologies s’améliorent et que les économies d’échelle augmentent. L’Agence Internationale pour les Energies Renouvelables (IRENA) note qu’avant la pandémie de Covid-19, 56 % des nouveaux projets d’énergie renouvelable à grande échelle produisaient de l’électricité à un meilleur prix que la nouvelle centrale thermique la moins chère. Le remplacement des 500 gigawatts les plus chers par des énergies renouvelables permettrait d’économiser 23 milliards de dollars de coûts d’électricité et d’éliminer 1,8 gigatonne d’émissions de CO2 chaque année, soit l’équivalent de 5 % des émissions totales de CO2 en 2019.[4]

Chez BNP Paribas, nous avons reconnu la nécessité de réduire la dépendance au charbon en novembre 2019 lorsque nous avons décidé de cesser tout financement dans le secteur du charbon thermique d’ici à 2030 dans l’Union européenne, et dans le monde d’ici à 2040. Nous avons également renforcé notre soutien au développement des énergies renouvelables avec un objectif de financement de 18 milliards d’euros d’ici à fin 2021.[5]

Les arguments économiques en faveur des énergies renouvelables parlent d’eux-mêmes – alors quelles sont les implications pour l’investissement ? Nous considérons l’adoption rapide des énergies renouvelables comme une « mégatendance » qui présente de nombreuses opportunités pour les investisseurs à la recherche de thèmes d’investissement durables. Le changement structurel d’une production centralisée basée sur les combustibles fossiles vers une énergie propre, renouvelable et décentralisée créera des opportunités pour les années à venir : l’infrastructure actuelle de production et de distribution d’électricité centralisée dans le monde est complexe, coûteuse et « difficile à réduire », nécessitant plusieurs phases de financement.

Suivez la tendance

La méthode la plus simple et la plus efficace pour capter la croissance des énergies renouvelables consiste à rééquilibrer les portefeuilles d’actions pour obtenir une plus grande exposition aux entreprises directement impliquées dans l’énergie verte et à celles qui bénéficient de l’adoption précoce des énergies renouvelables. Les entreprises répondant à ces critères sont celles impliquées dans l’innovation technologique et les équipements dans les domaines du solaire, de l’éolien, de la géothermie, de l’hydroélectricité et de l’hydrogène. Parce que l’énergie renouvelable dépend de processus naturels comme le climat, ses pics et ses creux doivent être normalisés, ce qui nécessite un stockage et de nouveaux modèles de distribution décentralisés. Les fabricants d’équipements électriques et de réseau, les batteries et les produits chimiques/matériaux connexes devraient également connaître une demande croissante.

Les nouvelles technologies de batteries, pour les années à venir, sont prometteuses, notamment pour le stockage d’énergie thermique, le stockage par gravité, l’air liquide et l’hydrogène. Des recherches sont en cours sur des développements tels que les batteries à flux redox au vanadium, les batteries à métal liquide et les batteries à faible coût qui utilisent des matières premières bon marché. L’accent mis sur les percées technologiques suggère un pipeline de nouveaux secteurs de croissance au cours des prochaines années.

La demande croissante de stockage sur batterie entraîne également une augmentation rapide de la demande pour leurs matières premières. Par exemple, le lithium – essentiel pour les batteries rechargeables – a doublé de prix depuis novembre 2020 en raison du soutien politique aux véhicules électriques combiné à des contraintes d’approvisionnement.[6] La valeur des sociétés minières développant des ressources en lithium devrait également augmenter du fait de ces stimuli, tout comme d’autres producteurs de métaux impliqués dans les énergies renouvelables, tels que le cuivre, le cobalt, le nickel, l’argent et les terres rares.

Il est clair qu’aucune technologie ne pourra à elle seule répondre à la demande mondiale d’énergies vertes avant 2050. Les productions solaire, éolienne, hydroélectrique et géothermique continueront à coexister car elles sont installées dans les endroits les mieux adaptés à leur production. Le déploiement des énergies renouvelables sera généralisé, créant des clusters de nouveaux fabricants et développeurs. Les investisseurs qui cherchent à diversifier leur exposition à travers ce spectre peuvent utiliser des fonds gérés activement ou bien des fonds thématiques négociés en bourse (ETF), y compris des fonds de matières premières, qui pourraient également répartir efficacement les risques.

Pensez au carbone

Le système d’échange de crédits de carbone de l’UE a pris de l’ampleur alors que l’UE s’efforce de créer un régime d’échange de droits d’émission plus strict. Le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE), lancé en 2005, a établi un commerce de certificats de carbone performant. La Californie, le Nord-Est des États-Unis et le Québec ont également des marchés de crédits carbone, tandis que la Chine a lancé cette année un marché du carbone qui couvre 3,3 milliards de tonnes de CO2. Un prix du carbone élevé incite davantage l’industrie à adopter des sources d’énergie à faible émission de carbone et promeut les systèmes de capture du carbone et les programmes de compensation carbone.[7] De nouveaux fonds de placement, y compris des ETF, sont désormais disponibles pour les investisseurs souhaitant participer à ces marchés.

Avec des taux d’intérêt susceptibles de rester bas pendant un certain temps, nous considérons les mégatendances à long terme comme un moyen pour les investisseurs de bénéficier de rendements attrayants et supérieurs au marché. Non seulement il s’agit d’un résultat positif pour les investisseurs, mais en plus ces investissements ont l’avantage d’être alignés sur le programme mondial de développement durable et d’être essentiels pour que les émissions de GES dommageables ne soient plus nécessairement liées à la production d’électricité.

[1] https://www.iea.org/reports/global-energy-review-2021/co2-emissions

[2] https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg1/

[3] https://www.iea.org/reports/net-zero-by-2050

[4] https://www.irena.org/newsroom/articles/2020/Jun/How-Falling-Costs-Make-Renewables-a-Cost-effective-Investment

[5] https://group.bnpparibas/en/press-release/bnp-paribas-announces-timeframe-complete-coal-exit-raises-financing-targets-renewable-energies

[6] https://www.reuters.com/business/energy/shortages-flagged-ev-materials-lithium-cobalt-2021-07-01/

[7] https://wealthmanagement.bnpparibas/fr/expert-voices/profiter-credits-carbone.html