#Entrepreneurs — 05.12.2016

Interview : d’un défi à l’autre

Interview avec Jennifer Fong, Chocolux

Choco-addict, certes, mais aussi photographe, créatrice de bijoux, styliste et philanthrope, Jennifer Fong est une femme entrepreneur aux centres d’intérêt pour le moins diversifiés.

C’est à partir de 2002, à son retour à Hong Kong après des études à l'étranger, qu’elle commence à travailler au lancement de Chocolux. Cette idée d’un concept-store dédié au chocolat est née alors que Jennifer étudiait à l'école de management hôtelier et culinaire Le Cordon Bleu, à Paris. Sa première enseigne ouvrira ses portes en 2004. Proposant des spécialités chocolatières françaises à forte teneur en cacao, son entreprise connaît un succès rapide et une deuxième boutique est inaugurée en 2007. En 2009, un laboratoire vient compléter l’offre : permettant d’assurer une production de volumes élevés en vue d’alimenter les deux boutiques, il accueille également des ateliers de fabrication.

Souhaitant modifier sa trajectoire entrepreneuriale, elle vend ses parts dans Chocolux en 2010 et se consacre désormais à de nouveaux projets.

Pouvez-vous nous décrire vos débuts d’entrepreneur ?

Jennifer Fong. J’ai toujours été une personne créative. A l’âge de 6 ans, je concevais déjà des vêtements. Je voulais devenir créatrice de mode. En grandissant, j’ai compris que la créativité pouvait s’exercer dans de nombreux domaines. Pour mon premier diplôme des Beaux-Arts, je me suis concentrée sur la photographie et la peinture. Ensuite, j'ai étudié la mode à New York. Puis j'ai découvert les arts culinaires et c’est à Paris que j’ai décidé de m’y initier, avec un intérêt tout particulier pour la préparation et la décoration des desserts. A mon retour à Hong Kong, quelques années plus tard, j’ai lancé Chocolux. Un projet amusant que j’ai mené de front avec d’autres activités, dans un registre un peu plus sérieux, au sein de l’entreprise familiale.

Comment s'est déroulée l’expérience Chocolux ?

J.F. Avant toute chose, je suis une choco-addict ! N'est-ce pas le rêve de toute jeune fille de posséder un bar à chocolat ? Alors, j'ai fait en sorte que mon rêve devienne réalité. Le chocolat noir possède de nombreuses vertus pour la santé et c’était également pour moins une façon de permettre à la population de Hong Kong de profiter de ses bienfaits. À l'époque, il n’existait pas vraiment de culture du chocolat à Hong Kong. D’ailleurs, aucune des grandes marques que vous y trouvez aujourd'hui n’était présente. Il s’agissait d’un concept complètement nouveau. C'était ce qui me fascinait. J'aime le fait d’être une pionnière ; c'était le moment idéal pour le lancement de Chocolux.

Vous êtes issue d'une famille d’entrepreneurs. Cela vous a-t-il inspirée ?

J.F. Indéniablement. C’est mon grand-père qui a monté l'entreprise familiale. Je me souviens de lui travaillant toujours à divers projets en même temps. Cela l’enthousiasmait beaucoup. Il semblait vraiment apprécier ce qu'il faisait et c’est son travail qui lui a apporté le succès. Cela m’a poussé à vouloir être entrepreneur à mon tour, afin d’avoir l’opportunité d’explorer mes différentes passions.

Pensez-vous que ce contexte vous a aidé à ne pas vous laisser intimider par les éventuels obstacles ?

J.F. C'est certainement un avantage, en effet. Cela vous rend plus téméraire et décidé à tenter de nouvelles choses. Etant une personne très optimiste, si je suis très excitée par une idée, je m’y investis pleinement et rapidement. Quand des problèmes se présentent, j'apprécie le défi consistant à les résoudre. J’avance pas-à-pas, sans trop m’attarder sur un projet dans sa globalité. Si je n’avais pas raisonné ainsi, je n’aurais probablement pas lancé mon premier business et je serais passée à côté d’une aventure incroyable.

Pensez-vous que la façon d’entreprendre a changé au fil des générations ?

J.F. Comparé à mon grand-père, je suis extrêmement chanceuse parce que, lui, il n'a pas eu beaucoup d’options. S'il n'avait pas été entrepreneur, il n'aurait probablement pas eu assez d’argent pour nourrir sa famille. Étant de la troisième génération, je n'ai pas à me préoccuper des mêmes problèmes. J’ai choisi d’être entrepreneur parce que cela me permet de mettre à profit ma fibre créative.

Avez-vous des mentors pour vous accompagner ?

J.F. J'ai beaucoup appris en observant mon grand-père et mon père. Ma sœur et mes amis m'ont aussi aidée dans cette aventure – surtout pour les tests de dégustation de gâteaux. Le reste de mon apprentissage vient quant à lui d'essais, mais aussi d'erreurs. Un bon exemple pour illustrer cela est le marketing que nous avions mis en place pour Chocolux. Au début, rien de ce que nous testions ne fonctionnait vraiment. Puis, un jour, je me suis dit : à Hong Kong, les gens ont une passion pour les buffets ; proposons-leur un buffet… de chocolat à volonté. Grâce à ce concept, nous avons affiché complet pendant un an. Étant une petite entreprise, nous étions en mesure de voir des résultats immédiats et de nous améliorer en permanence.

Quels conseils donneriez-vous à de jeunes entrepreneurs ?

J.F. Le premier est d'avoir la passion de ce vous faites. Je suis vraiment passionnée par la nourriture. Si j'avais échoué avec Chocolux, j’en aurais malgré tout tiré une satisfaction, notamment parce que j’ai vraiment pris du plaisir à développer la marque. Et je mangeais du chocolat tous les jours, ce qui vous rend beaucoup plus heureux ! Le deuxième conseil, c’est de vous entourer de votre famille et aussi d’amis qui vous permettent de garder les pieds sur terre. Parfois, je ne suis pas très réaliste : c’est important d’avoir des gens autour de soi qui ne vont pas hésiter à vous poser les bonnes questions. Quant au dernier conseil, qui est probablement le plus important, c'est de s'amuser !

Quel bilan tirez-vous de cette première expérience entrepreneuriale ?

J.F. La principale chose que j'ai apprise, c’est qu’il est important de garder une attitude positive. Le bien-être est vraiment un facteur à prendre en compte. Parfois, en affaires, il est facile de se concentrer exclusivement sur l’argent. Je ne dis pas que ce n'est pas important, bien sûr, mais ça ne représente pas tout. Ce qui est le plus important, c'est d'avoir une vie équilibrée : passer du temps avec sa famille et ses amis, travailler, faire de l’exercice, bien manger et se reposer. Je pense que certaines personnes oublient de se reposer !

Vous semblez toujours être à la recherche de nouveaux projets. Le début de l’aventure est-il vraiment la phase la plus amusante ?

J.F. Je le pense. J'aime les nouveaux défis. Je n'aime pas quand les choses stagnent. Mais le début est aussi la phase la plus difficile. Après un certain temps, votre rôle est absorbé par les opérations courantes. À ce moment-là, je laisse les autres prendre le relais et je pars à la recherche de nouveaux défis.

Dans l’intervalle, comment occupez-vous votre temps ?

J.F. Actuellement, je travaille sur un livre de photos, ce qui implique de beaucoup voyager. Je dessine également des fourrures et des bijoux, j’utilise mon atelier pour accueillir des cours sur la cuisine ainsi que sur l’art floral. Sur mon temps libre, je fais du bénévolat pour différentes ONG afin de les aider à planifier des événements et à collecter des fonds. Je reste impliquée dans des activités très variées !