Obligations hybrides : l’essentiel des hybrides Corporates en 10 questions
Sur les secteurs où des dépenses d’investissement – Capex - lourdes sont nécessaires (Utilities, Telecom), les hybrides corporate servent à financer les investissements sur des durées longues, mais sans détériorer le profil financier de l’émetteur. Aujourd’hui, les hybrides sont surtout utilisées pour du refinancement, par des émetteurs qui veulent stabiliser leur profil financier et éviter une baisse de leur rating. C’est un message positif envoyé aux agences de rating et aux porteurs d’obligations de rang senior par les émetteurs concernés.
2.Quelles sont les caractéristiques du marché des hybrides corporate ?
- Il s’agit d’un marché jeune : créé en 2005, il a connu un fort développement à partir de 2013 puis a été multiplié par 5. En 2016, ce marché représentait 101 Mds d’euros (20 Mds en 2013).
- Le gisement est limité : une centaine d’hybrides seulement (dont 90% libellées en Euro) sont disponibles, pour une cinquantaine d’émetteurs. Les émetteurs proviennent des secteur Utilities et Telecom en majorité, mais le marché s’est progressivement ouvert à d’autres secteurs.
- Il s’agit d’un marché assez liquide : les émissions sont très souvent de taille benchmark (supérieures ou égales à 500M d’Euros) et les titres cotent avec une fourchette de prix bid/ask relativement serrée.
3. Est-ce que tous les émetteurs d’hybrides sont notés ?
Non. Le marché s’est ouvert progressivement à des sociétés à la notoriété suffisante pour émettre des hybrides : Air France/KLM, Aryzta, Bourbon, Eurofins, VTG, Finnair, Outotec et Voestalpine. Les investisseurs ont rapidement apprécié le supplément de rendement offert par ces hybrides pour rémunérer l’absence de rating et d’informations régulières.
4. Quels avantages pour l’investisseur ?
Les émetteurs d’hybrides ont souvent un rating de grande qualité : les émetteurs notés sont essentiellement issus de la catégorie Investissement. C’est une différence notable par rapport au marché du High Yield Euro, où les émetteurs affichent un profil financier bien plus fragile. Ici, il s’agit de sociétés qui génèrent des cash-flow opérationnels solides et récurrents.
Le rendement des hybrides est attractif : ce rendement est élevé car il s’agit de titres subordonnés dont la notation est de 2-3 crans inférieure en moyenne à la dette de niveau senior de l’émetteur. D’autres risques propres à ce type d’instrument participent aussi à rendre leur rendement plus élevé.
Les hybrides en Euro dont le premier call se situe dans 5 ans procurent aujourd’hui un rendement moyen proche de 3% (à comparer à un rendement d’environ 0,50% pour ces mêmes émetteurs en dette senior à 5 ans). Le supplément de rendement est donc appréciable. Il en est de même pour le risque relatif : il faudrait aujourd’hui oser acheter une obligation High Yield de rating B pour avoir un rendement identique sur cette même durée. On constate donc que le rapport rendement/risque des hybrides est attractif. De plus, les incidents propres aux hybrides sont rares
5. Quels sont les risques à détenir des hybrides Corporates ?
- Le risque de Crédit : c’est un facteur essentiel. Ce risque est limité pour les émetteurs qui sont dans un processus d’amélioration régulière de leur profil financier. Puisque que les émetteurs d’hybrides sont essentiellement notés Investment Grade, leur rating est peu volatile.
- Le risque de taux : la sensibilité aux variations de taux sera plus forte pour des hybrides dont la première date de call est lointaine.
- Le risque de subordination. En cas de défaut de l’émetteur, le taux de recouvrement est en général extrêmement faible pour les porteurs de titres hybrides, les porteurs de dette Senior étant prioritaires (après le paiement des salaires, taxes et de la dette sécurisée s’il en existe). Mais les défauts d’émetteurs notés Investment Grade sont extrêmement rares.
- Le risque d’extension : si l’hybride n’est pas rappelée à sa première date de call, le choc sur la valorisation du titre peut être de l’ordre de -10%. Des cas se sont déjà produits.
- Le risque de non-paiement du coupon : le risque est très faible en période de croissance économique mais peut néanmoins se produire pour des émetteurs en difficultés importantes. Les conséquences sont souvent graves pour l’émetteurs en termes d’accès futur au marché obligataire. Sa réputation est souvent entaché par ce type d’évènement.
- Le risque de call à 101% : il se produit si les clauses présentent dans le prospectus d’émission son activées par certains évènements (par exemple, en cas de changement de méthodologie de la part des agences de rating). Ce risque est devenu plus rare qu’il y a deux ans. Mais par prudence, nous préférons recommander l’achat d’hybrides dont le prix est inférieur à 101%.
- Le risque de volatilité : les hybrides Corporates sont corrélées positivement aux marchés actions. En cas de période d’aversion au risque, les actions baissent et le spread de crédit des hybrides augmente (hausse du rendement et donc baisse du prix des hybrides).
6. Bien que ces titres soient “perpétuels”(ou de durée extrêmement longue), y-a-t-il néanmoins une possibilité de récupérer le capital investi sans vendre l’hybride ?
Oui, Il existe une date de call (5 ans ou 10 ans après la date d’émission). Lorsque le call est exercé par l’émetteur, l’investisseur est alors intégralement remboursé (au prix de 100%). Par convention de marché, les hybrides corporates sont normalement remboursées à première date de call. Les cas de non-exercice du call sont rares. Le rendement de l’hybride est également calculé à cette première date de call.
7. Est-ce que le paiement du coupon est garanti ?
Non. L’hybride étant un titre subordonné représentatif de quasi-fonds propres, l’émetteur est autorisé à ne pas payer le coupon sans qu’une situation de défaut ait été prononcée. Le paiement du coupon se fait donc à sa discrétion.
Ne pas payer un coupon est une décision grave qui impacte négativement la réputation de l’émetteur et limitera sa capacité à se refinancer en dette hybride mais aussi en dette senior. Elle est en général décidée en cas de très fortes difficultés de l’émetteur. D’où l’importance de toujours être capable de suivre l’évolution du profil financier de l’émetteur sur une base régulière. Le risque de non-paiement du coupon est plus élevé sur des émetteurs non notés.
Enfin, si un dividende n’a pas été versé sur l’action, l’émetteur peut décider de ne pas payer le coupon sur l’hybride. Les coupons étant dits cumulatifs, ceux qui n’ont pas été payés seront réglés en totalité le jour où l’émetteur sera en mesure de verser à nouveau un dividende sur son action.
8. Comment va évoluer le prix de l’hybride si jamais le call n’est pas exercé et le coupon non payé ?
Un instrument financier sans date d’échéance (perpétuel) et qui ne verse plus de coupons ne vaut pas grand chose. Il va perdre facilement 60% de sa valeur et devenir illiquide. Mais l’émetteur peut très bien ne pas être en situation de défaut et des mesures peuvent être progressivement prises pour améliorer la génération des cash flows manquants (cession d’activités, suspension du dividende, réduction des CAPEX, augmentation de capital, entrée d’un nouvel actionnaire au capital, soutien par les banques, etc…). Il existe donc souvent un espoir d’amélioration bien plus fort comparativement à l’annonce d’un défaut sur un émetteur High Yield.
9. Quels sont les facteurs principaux qui agissent sur le prix de l’hybride ?
Les hybrides Corporates sont positivement corrélées aux marchés actions : cela signifie que lorsque les actions montent, le prix des hybrides Corporates monte également. En fait, les actions montent le plus souvent lorsque les acteurs des marchés anticipent une amélioration de la croissance économique. Or, ce contexte macro favorable participe à améliorer également le profil financier des émetteurs. Les ratings s’améliorent, les spreads de Crédit se réduisent et donc le prix des hybrides monte. A l’inverse, une chute des marchés actions pénalisera la valorisation des hybrides.
A noter que dans un contexte de croissance économique, les taux de référence (taux longs allemands) sont souvent orientés à la hausse, ce qui devrait pénaliser la valorisation des hybrides. Or, c’est rarement le cas car la réduction du spread de crédit est souvent plus forte que la hausse des taux de référence. Ce spread de crédit est en effet la plus grande composante du rendement de l’hybride.
A titre d’exemple, prenons l’hybride EnBw 3,375% 2077 call 04/2022. Elle affiche un rendement au call de 2,23% qui peut être scindé en 2 parties : le taux de référence (emprunt d’Etat allemand à 5 ans), actuellement à -0,25%, auquel s’ajoute un spread de crédit de 248bps (au 25/07/17). Ce spread de crédit significatif (pour une hybride notée en catégorie Investissement) présente un potentiel de réduction en cas de hausse des taux.
Enfin, la variation de la probabilité de non-call crée également de la volatilité. En revanche, tout se complique et devient plus risqué sur les hybrides dans un contexte de ralentissement économique (et pire, dans un contexte de récession).
10. Quelle est aujourd’hui notre logique de sélection en matière d’hybrides Corporates ?
- Des émetteurs qui ont plusieurs hybrides encore en vie.
- Des hybrides notées par S&P (pour la perte systématique de “l’Equity Content” après le 1er call).
- Une première date de call pas trop lointaine (7 ans maxi en Euro).
- Des émetteurs qui tiennent à leur réputation.
- Des émetteurs au profil financier stable ou en amélioration.
- Des émetteurs considérés comme des acteurs majeurs du marché Investment Grade et qui font des profits (pour éviter le non-versement du dividende).
- Des hybrides dont le prix n’est pas trop supérieur à 101%.
- Notre objectif prioritaire est de faire encaisser des coupons élevés avec régularité à nos clients jusqu’à la première date de call, sur des hybrides pas trop volatiles.
1. Que sont les hybrides corporate ?
Les hybrides corporate sont des titres subordonnés émis par des sociétés non financières (“Corporates”). Ces titres sont dits hybrides car ils combinent des caractéristiques propres aux obligations (versement d’un coupon) et aux actions (pas de date d’échéance, ou bien des maturités très longues; un coupon qui peut ne pas être versé, comme pour un dividende).
Les agences de rating considèrent l’hybride pour moitié seulement comme de la dette. L’autre moitié est considérée comme du capital (notion d’ “Equity Content”), propre à améliorer les ratios de Crédit de l’émetteur.