Perspectives des marchés actions en 2018
Notre préférence pour les marchés pro-cycliques demeure intacte
Dans l’ensemble, nous pensons que les actions américaines conservent un potentiel haussier intéressant en 2018. Toutefois, celui-ci sera probablement plus élevé dans la zone euro et au Japon. La Suisse devrait également afficher un potentiel haussier proche de celui des Etats-Unis.
Actions américaines : de nouveaux records à l’horizon, mais meilleur potentiel haussier ailleurs. Notre positionnement est toujours neutre. Grâce aux réductions d’impôts (qui devraient gonfler les bénéfices de 7 points de pourcentage en 2018) et au rapatriement des bénéfices (qui entraînera certainement un rebond de l’activité déjà soutenue de rachats d’actions et de fusions-acquisitions), la croissance des bénéfices américains devrait demeurer largement supérieure à celle des chiffres d’affaires.
En tenant compte également de la contribution d’une légère dépréciation du dollar et des pressions modestes qu’exerceront les augmentations de salaires sur les marges, nous estimons que la croissance des BPA en 2018 s’établira à 12%. Ce rythme demeure très intéressant par rapport à d’autres marchés du monde.
Les révisions à la hausse des prévisions de bénéfices dans le sillage des réductions d’impôts n’affectent pas notre conclusion en ce qui concerne les valorisations. Il est évident que le marché actions anticipe déjà une partie importante des bienfaits des réductions d’impôts, car le PER prévisionnel a progressé de 0,5 point de pourcentage ces deux derniers mois, renchérissant des niveaux de valorisation déjà extrêmes. L’analyse d’autres ratios, comme les ratios cours/valeur comptable et cours/chiffre d’affaires, nous amène à la même conclusion.
Le potentiel haussier des actions américaines est visiblement limité par le niveau élevé des valorisations. C’est pourquoi nous préférons d’autres marchés plus pro-cycliques. Cette préférence est également justifiée par le fait que nous prévoyons 3 relèvements de taux de la part de la Réserve fédérale, alors que la BCE et la Banque du Japon devraient maintenir le statu quo.
Actions de la zone euro : un potentiel haussier supérieur à la moyenne. La sous-performance des actions de la zone euro en 2017 s’explique principalement par l’appréciation de 8% de l’euro en termes pondérés des échanges commerciaux.
La devise ne devrait plus beaucoup s’apprécier à partir des niveaux actuels. Les fondamentaux, qui sont attrayants, devraient dès lors pouvoir s'affirmer. Nous identifions trois grands moteurs de surperformance en 2018. Le premier a trait aux perspectives de croissance bénéficiaire. Depuis la mi-2016, le thème du rattrapage des bénéfices commence à prendre forme.
Les tendances de la demande intérieure et des exportations sont solides, tandis que les entreprises affichent un bon levier opérationnel et financier, sur fond d’activité de rachats d’actions qui devrait donner un élan supplémentaire aux bénéfices. Le deuxième moteur que nous identifions est la pentification de la courbe des taux, où les taux d'intérêt à court terme devraient rester stables bien après fin 2018 alors que les rendements obligataires vont probablement suivre la tendance à la hausse à l'échelle mondiale.
Ces tendances seront favorables aux valeurs financières, qui représentent 21% de l’indice Euro Stoxx. Enfin, les valorisations sont seulement à des niveaux proches de leur moyenne à long terme, ce qui peut donner lieu à une réévaluation si les investisseurs se laissent convaincre par des éléments probants dans un contexte de liquidité toujours abondante.
Le Japon est encore capable de surperformer. Les fondamentaux du marché bénéficient toujours d'un environnement favorable.
Les investissements privés sont importants et devraient le rester si l’on considère le niveau élevé de la confiance des entreprises, la faiblesse du taux de chômage et la préparation des Jeux Olympiques de Tokyo en 2020. Les exportations devraient rester bien orientées malgré le tassement de l’activité en Chine.
Les dépenses de consommation devraient également rester soutenues sous l’effet de la vigueur du marché du travail et des augmentations de salaires, malgré un léger raffermissement des tensions inflationnistes. Tous ces facteurs vont favoriser la poursuite d’une croissance solide des bénéfices. Dans le même temps, les entreprises vont maintenir les efforts déployés pour privilégier les intérêts des actionnaires, qui sont une des raisons de la croissance ininterrompue des bénéfices ces derniers trimestres en dépit des fluctuations latérales du yen.
L’autre raison est la solidité de la demande intérieure. Le Japon conserve donc son potentiel de surperformance grâce à des perspectives robustes de croissance bénéficiaire, la possibilité d’accroissement des ratios de distribution (le plus faible parmi les grands marchés), le fort potentiel de rachats d’actions et le léger repli attendu sur le front du yen, couplés à des valorisations attrayantes, qui devraient attirer des investissements dans les actions japonaises (notamment de la part des investisseurs étrangers, qui sont toujours sous-exposés à ce marché).
Au Royaume-Uni, la dynamique affaiblie des bénéfices justifie un positionnement neutre. Les perspectives économiques sont assombries par les incertitudes entourant le Brexit, tant sur le plan de la consommation que des dépenses d'investissement. Par conséquent, les perspectives de bénéfices sont relativement modestes.
La structure défensive du marché actions britannique est aussi l’une des raisons qui expliquent la croissance décevante des bénéfices, qui s'établira probablement aux alentours de 5%. Les investisseurs devraient continuer de négliger le marché des actions britanniques en raison de son bêta inférieur à la moyenne. Sur une note positive, les valorisations reflètent déjà ces incertitudes importantes, mais elles resteront probablement sous pression, car le chemin du Brexit s’annonce long et tortueux.
Suisse : la croissance solide des bénéfices est tempérée par des valorisations élevées, d’où un positionnement neutre. La Suisse fait partie des marchés dont les perspectives de croissance bénéficiaire sont les plus prometteuses (environ 15% attendus en 2018).
Cela s'explique en partie par la dépréciation de 6% du franc suisse en termes pondérés des échanges commerciaux depuis mi-2017. Néanmoins, cette croissance bénéficiaire est étroitement liée à la vigueur de la croissance économique mondiale, dont les entreprises suisses sont très dépendantes. Un grand nombre d’entre elles génèrent en effet au moins 90% de leur chiffre d’affaires à l’étranger.
Compte tenu de ces perspectives florissantes, la Suisse ferait partie de nos marchés favoris si les valorisations n’y étaient pas aussi élevées : leur PER par rapport au reste du monde est au plus haut depuis au moins 1990, et leur ratio cours/valeur comptable affiche une prime de 20% par rapport au marché actions mondial, dans la partie supérieure de la fourchette des vingt-cinq dernières années.
En conséquence, le potentiel de hausse des actions suisses n’est probablement pas aussi élevé que celui que nous anticipons sur les marchés actions de l'Union européenne et du Japon, mais elles sont bien positionnées pour enregistrer une performance au moins aussi bonne que leurs homologues américaines. Elles offrent par ailleurs un rendement du dividende attractif, à 3%.
Marchés émergents : beaucoup de facteurs séduisants, mais aussi quelques obstacles à court terme. Nous sommes neutres. Leur principal attrait est lié aux perspectives économiques et à leur impact sur la croissance des bénéfices et le rendement des fonds propres. Dans un avenir prévisible, la croissance des économies émergentes sera au moins deux fois supérieure à celle des pays développés, ce qui devrait nettement soutenir la croissance bénéficiaire. Les taux de rendement des fonds propres s’améliorent dans les secteurs de l’informatique, des matériaux et de l'énergie, et devraient bientôt s’accroître également dans les biens de consommation courante et l’industrie. Les valorisations sont un autre élément intéressant, en particulier si l’on considère la progression substantielle du secteur technologique au sein de l’indice. Néanmoins, nous identifions les obstacles suivants à court terme : la hausse attendue du dollar et des rendements obligataires, ainsi que l’incertitude entourant l’ampleur du ralentissement de l’activité en Chine. Celui-ci devrait être limité, mais dans l’expectative, les investisseurs feront probablement preuve de nervosité. Nous maintenons notre préférence pour l’Asie hors Japon, et en particulier pour la Chine et l’Inde.
Notre analyse nous conduit à privilégier les marchés actions les plus pro-cycliques en 2018. Toutefois, nous avons de bonnes raisons de penser que le différentiel de performance entre les grands marchés pourrait finalement être assez limité, car les Etats-Unis bénéficieront des réductions d’impôts, les pays émergents, de la poursuite de l’amélioration du rendement des capitaux propres et la Suisse, de la dépréciation du franc.