#Stratégie d'investissement — 15.01.2018

Suisse : perspectives 2018 pour le marché financier

Roger Keller

Dans notre dernier article sur les perspectives économiques de la Suisse, nous avons conclu que la conjoncture y était prometteuse.

En quelques mots :

- La croissance du PIB réel devrait augmenter pour passer de 0,9% en 2017 à 1,8% en 2018, avant de ralentir légèrement en 2019.

- L’inflation devrait encore se renforcer : après avoir atteint 0,5% en 2017, elle devrait continuer de grimper pour s'établir à 0,6% et 0,9% en 2018 et 2019 respectivement.

- La Banque nationale suisse prendra son temps pour modifier ses politiques. Nous nous attendons à ce que les taux d’intérêt restent inchangés pour l’ensemble de l’année 2018.

Nous aborderons aujourd'hui nos prévisions pour le franc et les marchés boursier et obligataire suisses.

Une légère dépréciation du franc par rapport à l’euro en 2018

Nous ne pensons pas que le franc présente un potentiel de dépréciation important dans un avenir prévisible. En effet, beaucoup d’investisseurs suisses ont notamment souffert du « choc du franc » en janvier 2015. Ils sont dès lors susceptibles de profiter d’un retour de la parité EUR/CHF à un niveau proche de 1,20 pour réduire leurs participations en devises étrangères. En outre, l’année 2018 devrait marquer le « pic de croissance » de l’économie mondiale, ce qui signifie que les investisseurs penseront de plus en plus au risque que la prochaine récession se produise avant l’année 2020. Un excédent de la balance courante de 10% du PIB et un solde budgétaire à l'équilibre soutiennent un franc fondamentalement fort. Compte tenu de ces facteurs, notre objectif de fin d’année 2018 pour la parité EUR/CHF est de 1,18. Par rapport au dollar américain, nous estimons que la parité devrait rester proche du niveau actuel de 0,98.

Des perspectives en berne pour les obligations

La Banque nationale suisse devrait garder ses taux d’intérêt inchangés en 2018, mais les perspectives des obligations sont médiocres. Les rendements obligataires devraient évoluer de manière directionnelle en ligne avec la tendance sur le marché obligataire mondial. S'agissant des échéances courtes, ils devraient logiquement augmenter légèrement. Le rendement des obligations d’Etat à deux ans devrait selon nous passer de -1% à -0,90%. Par conséquent, les obligations d'échéance courte offriront des rendements négatifs, sauf si l’on envisage des obligations dotées d'une notation inférieure à BBB. Les obligations d'échéance plus longue devraient se déprécier encore plus significativement. Le rendement des obligations d’Etat à 10 ans devrait passer de -0,20% à +0,20%. En comparaison, nous anticipons une augmentation de 60 points de base du rendement des Bunds (obligations d’Etat allemandes) à 10 ans, passant de 0,40% à 1%. Il sera donc très difficile d’obtenir des rendements positifs sur les obligations en CHF.

Des perspectives attrayantes pour les actions suisses

Parmi les pays que nous suivons, les actions suisses recèlent, après leurs homologues indiennes, le meilleur potentiel de croissance des bénéfices en 2018 (environ 15%). Ce taux de croissance est particulièrement soutenu par la dépréciation de 6% du franc suisse en termes pondérés des échanges commerciaux depuis mi-2017. Un facteur plus important encore est l’impact sur les entreprises suisses d’une économie mondiale robuste, étant donné qu’une proportion élevée d’entreprises génèrent au moins 90% de leurs revenus totaux en dehors de la Suisse. Avec de telles perspectives bénéficiaires, les actions suisses sont bien positionnées pour offrir des rendements intéressants en 2018. Toutefois, compte tenu de leurs valorisations élevées, il est peu probable que leur performance en 2018 dépasse le taux de croissance des bénéfices : nous prévoyons environ 10% de plus-values. Le PER des actions suisses par rapport au reste du monde est au plus haut depuis au moins 1990, et leur ratio cours/valeur comptable affiche une prime de 20% par rapport au marché actions mondial, dans la partie supérieure de la fourchette des vingt-cinq dernières années. En conséquence, le potentiel de hausse des actions suisses n’est probablement pas aussi élevé que celui que nous anticipons sur les marchés actions de la zone euro et du Japon, mais elles sont bien positionnées pour enregistrer une performance au moins aussi bonne que leurs homologues américaines. Les investisseurs ne doivent pas oublier que les actions suisses offrent un rendement du dividende intéressant de plus de 3%.

Les titres des petites et moyennes capitalisations sont pour leur part onéreux, raison pour laquelle nous favorisons ceux de leurs grandes consœurs.

Etant donné que nous prévoyons une accélération de la croissance en 2018 et que l’inflation est également en hausse modérée, les perspectives pour les obligations suisses sont mauvaises. En revanche, les actions du pays offrent un potentiel haussier intéressant, notamment grâce à l’affaiblissement du franc. Ce dernier devrait clôturer l’année à quelque 1,18 par rapport à l’euro.