Briser le plafond de verre
L'actuelle domination des hommes sur l’univers du capital-risque complique la tâche des femmes entrepreneurs. Certaines tentent toutefois de rétablir l’équilibre.
« Le principal problème réside dans l’existence d’un parti pris inconscient chez les investisseurs masculins. »
Anne Ravanona
Fondatrice et présidente de Global Invest Her
Les femmes entrepreneurs n'ont accès qu’à une fraction des fonds auxquels ont accés leurs homologues masculins. Elles doivent en outre lutter contre des préjugés tenaces pour réussir en affaires. Celles qui y parviennent sont cependant déterminées à changer les choses pour celles et ceux qui leur emboîteront le pas.
« La dure réalité, c’est que ma fille de 15 ans n’aurait pas les mêmes chances que mon fils de 12 ans s’ils décidaient tous les deux de lever des fonds aujourd’hui », explique Anne Ravanona, fondatrice et présidente de Global Invest Her, une plateforme qui cherche à améliorer l’accès au financement des femmes entrepreneurs.
« Je travaille dur pour faire changer cela. La plateforme et communauté Global Invest Her cherche ainsi à démystifier le processus de collecte de fonds pour les femmes entrepreneurs afin de les aider à convaincre les investisseurs. »
Une étude réalisée en 2016 par TechCrunch illustre bien l’ampleur de la tâche qui attend Anne Ravanona, qui est aussi chroniqueuse pour le Huffington Post et conférencière TEDx.
Entre 2010 et 2015, seulement 10 % des dollars investis en capital-risque (31,5 milliards de dollars) et 17 % des capitaux d’amorçage/business angels (2,35 milliards de dollars) dans le monde avaient été alloués à des start-ups dont au moins un des fondateurs était une femme.
La même étude a également montré que 7 % des associés des 100 premières sociétés de capital-risque au monde étaient des femmes et que seulement 38 % comptaient au moins une associée. En élargissant l’étude à 2 300 sociétés de capital-risque plus petites, la proportion hommes-femmes restait presque la même : seulement 8 % des associés de ces entreprises étaient des femmes.
« Le principal problème réside dans l’existence d’un parti pris inconscient chez les investisseurs masculins. Ils ont tendance à opter pour ce qu’ils connaissent déjà et pour ce avec quoi ils se sentent à l’aise. Ils accordent donc plus spontanément leur confiance à d’autres jeunes hommes blancs. C’est une tendance naturelle : il n’y a pas de vendetta personnelle contre les femmes », détaille Anne Ravanona.
Le pitch de 10 minutes qu’il faut traditionnellement présenter pour obtenir des fonds désavantage aussi les femmes, car celles-ci ont davantage tendance à entrer dans les détails que leurs homologues masculins.
« Les investisseurs masculins ont parfois l’impression, à tort, que nous dévions du sujet, car nous sommes portées à fournir beaucoup de données pour étayer nos projets. Les femmes aiment aussi développer des relations, mais elles n’ont pas suffisamment de temps pour le faire en 10 minutes », développe Anne Ravanona, qui s’adresse essentiellement aux femmes entrepreneurs qui cherchent à obtenir des capitaux d’amorçage ou à faire des levées de fonds en série A.
Laisser leur marque
Dans le cadre de son rapport 2017 sur les Entrepreneurs Elites dans le monde, BNP Paribas Wealth Management a interviewé près de 1 000 femmes entrepreneurs sur un échantillon total de 2 650 entrepreneurs.
Les deux tiers des femmes interrogées ont indiqué qu’elles devaient surmonter des obstacles plus importants que leurs homologues masculins pour réussir.
« Leur but commun est d’obtenir des résultats positifs pour leur entreprise tout en changeant la société », indique le rapport.
« Ce sont des femmes de tête qui savent ce qu’elles veulent léguer aux entrepreneurs de demain qui leur emboîteront le pas, quel que soit leur sexe. »
« Il y a encore du chemin à faire dans notre société pour que les femmes entrepreneurs soient pleinement acceptées et qu’elles puissent bénéficier des mêmes possibilités. »
Dans la deuxième partie de cet article, nous verrons que le nombre d’entreprises dirigées par des femmes augmente en dépit des obstacles rencontrés. De nombreuses femmes découvrent en effet que l’entrepreneuriat est le meilleur moyen de trouver un emploi intellectuellement stimulant.
7%
des associés au sein des 100 premières sociétés de capital-risque au monde sont des femmes